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restreint et les prix ont décru ; le terme des commandes sur une grande échelle était expiré, et le régime du débouché d’exception faisait place au régime du débouché ordinaire. C’est si bien là le motif du temps d’arrêt qui s’est produit qu’indistinctement toutes les nations qui forgent le fer en grand en ont éprouvé l’effet. Pour la France, il s’y est joint la circonstance particulière d’une certaine latitude accordés à l’importation étrangère, qui visiblement n’en a point abusé. Telles sont l’origine et les causes de cette sorte de mue qui affecte l’industrie du fer et tend à en modifier l’économie. Le signe le plus visible de ce changement d’état, c’est un penchant vers les grandes concentrations. Devant des conditions d’existence plus contestées, les petits ateliers désarment, tandis que les établissement principaux, cherchent à mieux constituer leurs forces : les forges restées debout se partagent les dépouilles de celles qui tombent, ou bien elles se constituent en syndicat pour présenter un front plus vaste dans une défense commune. Le mot d’ordre semble être d’augmenter la production pour alléger le poids des frais généraux, ce qui serait juste avec un, marché dégarni, mais ce qui aggrave les conditions d’un marché encombré.

Cette crise a rendu possible, dans le traitement du fer, la révolution dont il nous reste à parler, et qui est devenue la grande affaire du jour. Divers incidens l’avaient préparée ; de plusieurs côtés ; et pour des besoins urgens, on demandait à l’industrie un fer mixte qui eût une partie des qualités de l’acier en restant dans des prix plus modérés. Pour beaucoup d’emplois, les conditions de résistance du fer marchand n’étaient plus suffisantes. Tel était le cas des rails, dont le métal, sujet aux exfoliations, se désagrégeait plus qu’il ne s’usait et obligeait les compagnies à des renouvellemens trop fréquens dans la garniture des voies : aussi déclarait-on qu’il y aurait profit, dût-on le payer plus cher, à employer un métal mieux lié, plus homogène et susceptible de plus de durée. De la part de la marine militaire, même besoin et même demande, et cela pour deux fins ou deux intérêts, l’attaque et la défense, L’attaque rêvait des canons monstrueux capables de résister aux plus fortes charges, ou tout au moins des canons fortifiés par des frettes puissantes qui les missent à l’abri de tout accident, puis encore des boulets dont les pointes coniques pussent pénétrer les plaques massives qui servent de ceinture aux flancs des vaisseaux. La défense bornait ses prétentions à devenir complète et efficace, quelque métal, quelque procédé qu’on y employât. Ce concert de réclamations aboutissait à ceci, que ni le fer, ni l’acier ordinaires ne répondaient désormais à de certains usages, et qu’entre les deux il y avait place pour une combinaison qui participât de l’un et de