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sont disposés en ados, au sommet de chacun desquels s’ouvre une petite rigole d’irrigation. Les travaux d’installation d’un hectare de prairie s’élèvent à 1,800 francs ; il est vrai que le produit est énorme : il monte à 12,000 kilogrammes de foin d’une valeur de 800 francs au moins. Le principal arrosement a lieu à l’automne ; au printemps, on abreuve de nouveau le pré avant la première coupe, et l’été avant la seconde. L’hectare se vend de 10,000 à 11,000 francs et se loue 400. Les travaux de premier établissement et d’entretien des grands canaux s’exécutent à frais communs par les soins d’une administration que les intéressés désignent. La minorité, après avoir fait valoir ses objections au sein de l’assemblée générale, est obligée de se soumettre aux décisions de la majorité. Cet exemple montre une fois de plus quelle valeur extraordinaire peut communiquer à un sol de qualité médiocre le travail humain bien dirigé. Il existe à Siegen une école de praticulture dont les élèves, habitués en dehors de leurs études théoriques à établir eux-mêmes des prés irrigués, sont partout recherchés en Allemagne.

Le nord de la Westphalie et presque tout le Hanovre présentent encore les modes de culture les plus primitifs. Les bruyères occupaient autrefois le tiers de la superficie. Grâce au partage des biens communaux, elles n’en prennent plus que le quart. Dans le sous-sol se trouve une croûte ferrugineuse qui, arrêtant l’écoulement des eaux, s’oppose à la croissance des arbres et rend les herbages aigres. Le système de culture généralement en usage est celui que l’on nomme en Allemagne Plaggen-wiihschaft. On coupe la superficie de la bruyère qui contient un peu d’humus et de force végétale ; on transporte les mottes sous le bétail, où elles se transforment en engrais, et on entretient ainsi la fertilité des terres cultivées, soumises cependant au plus détestable assolement. On y met du seigle dix et vingt ans de suite, avec parfois un peu de pommes de terre et de sarrasin. La partie du territoire qui est cultivée s’appelle esch ; elle s’est élevée de plusieurs pieds par suite de l’adjonction constante des mottes.de bruyère. Un mur de terre et un fossé planté en taillis l’entourent et la préservent du bétail. Chaque cultivateur exploite sur le esch plusieurs parcelles entremêlées avec celles des autres habitans du village. Naguère régnait encore ce que l’on appelait le flurzwang, antique coutume qui obligeait tous les cultivateurs à faire à la même époque les semailles et la moisson afin de permettre aux troupeaux de paître sur les chaumes. Maintenant que ces entraves ont disparu, les cultures sont plus variées : fourrages et racines commencent à se montrer après les céréales. Dans la Frise orientale et dans l’Oldenbourg, on retrouve les mêmes usages ; seulement l’esch s’appelle ici geest ou gast.

Autrefois la marche, — terrain vague entourant les champs