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l’hiver dure près de six mois, et les gelées de juillet brûlent fréquemment les pommes de terre. Au fond des vallées qui sillonnent le pays s’étendent de bonnes prairies ; et, comme on sait, la vigne se cultive avec grand succès aux bords du Rhin, de la Moselle, de la Nahe et de l’Ahr. A partir de Cologne s’ouvre une plaine couverte d’un riche limon qui atteint dans le pays de Juliers le plus haut degré de fertilité. C’est avec le district de Magdebourg la plus belle région agricole du royaume. L’étendue des voies de communication, le développement de l’industrie, favorisé par le bon marché des charbons de la Ruhr, la densité de la population, qui arrive à 6,000 âmes par mille carré, la division de la propriété, tout contribue à faire de la province rhénane, malgré bien des terrains de mauvaise qualité, la partie la plus riche de la Prusse. Les propriétés inférieures à 8 hectares y prennent environ la moitié de la superficie, proportion tout à fait exceptionnelle dans le royaume. Les grandes propriétés supérieures à 150 hectares y existent aussi, elles occupent encore les 22 centièmes du territoire.

La plus belle acquisition que la dernière guerre ait value à la Prusse est sans contredit le Slesvig-Holstein, qui comprend 1,859,000 hectares avec 1,022,000 habitans. La côte orientale vers la Baltique et le centre forment la partie haute, le geest, dont le sol d’argile et de sable est également favorable aux prairies et aux céréales. Sur la côte occidentale, aux bords de la Mer du Nord, le marsch, formé, comme les polders de la Hollande, par des dépôts d’alluvion, est d’une merveilleuse fertilité. Cette zone d’argile, que l’on appelle klai, convient parfaitement à l’engraissage du bétail. Les paysans sont partout très aisés, et la classe rurale constitue les trois quarts de la population totale. Les fermes (bauernhöfe), entourées de fossés, se cachent sous d’épais massifs d’arbres qui les protègent contre la violence des vents de mer. Il y règne un comfort rustique, non sans élégance, qu’on ne rencontre nulle part en Europe, sauf dans la province néerlandaise de Groningue, dont les conditions physiques et sociales ressemblent beaucoup à celles du Slesvig-Holstein, 120,000 hectares sont boisés, 300,000 en prairies, 1,300,000 en terres arables. Sur celles-ci se pratique un assolement particulier, connu en Allemagne sous le nom de holsteinische Koppelwirthschaft, Les champs (koppel) sont entourés de deux fossés entre lesquels s’élève un épaulement de terre où croît un taillis de bouleaux et d’aunes coupé tous les neuf ans. Par ce système de clôture, on assèche les terres, on obtient du bois et on protège les récoltes des atteintes du bétail. La rotation suivie sur les koppels, et qui constitue l’assolement holsteinois, comprend neuf années. Pendant la première année, la terre est en jachère ; à la deuxième, on sème le froment ; à la troisième, l’orge ; à la