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impériale, avec laquelle il avait eu d’anciens rapports, diplomate volontaire au service de cette pensée de transaction.

Ce qu’on pouvait laisser entrevoir à l’Autriche, il est facile de le pressentir : des avantages financiers et commerciaux, la possibilité d’un mariage qui placerait un jour une archiduchesse sur le nouveau trône italien, l’alliance de l’Italie dans les affaires d’Allemagne ou d’Orient. Et de fait, avec cette tentative coïncidaient tout à coup des signes nombreux, caractéristiques, d’un adoucissement sensible dans les relations de l’Italie et de l’empire. La presse autrichienne parlait d’un ton moins acerbe des affaires italiennes ; la proposition d’un traité de commerce surgissait dans cette phase nouvelle comme un acheminement à une solution plus large et plus politique ; pour la première fois, les batteries de Pola saluaient la bannière aux trois couleurs, et des vaisseaux italiens, pour échapper à la tempête, trouvaient un refuge hospitalier dans un port de l’Autriche. Ces indices extérieurs avaient une signification qu’on ne soupçonnait guère alors. La vérité est qu’à une certaine heure, vers le mois d’octobre 1865, le cabinet de Florence pensa sérieusement avoir touché le but ; il put croire un moment Venise affranchie sans combat. Ce n’était malheureusement qu’une illusion. Les velléités réelles et nombreuses qui existaient à Vienne allaient se heurter contre un certain ressentiment, contre les préjugés du parti militaire et féodal, contre la fierté des Hapsbourg, qui ne pouvait se résigner à abandonner l’Italie.

L’Autriche hésita, elle laissa fuir l’occasion, et pendant ce temps M. de Bismark, de son côté, n’hésitait pas. La convention de Gastein était pour lui simplement une étape où il ne comptait point s’endormir, où il ne voulait s’arrêter que tout juste assez pour avoir raison des difficultés qui l’entouraient, — car ce terrible homme avait, lui aussi, ses difficultés : il avait à se démener au milieu de tous les partis dont il violentait les instincts ou les traditions ; il avait à désarmer les scrupules dont le roi se sentait parfois assailli ; il avait à disposer de la Prusse contre la volonté de la Prusse. Il n’était pas homme à se déconcerter pour si peu. Il avait à peine fait un pas qu’il combinait déjà une nouvelle marche en avant, et à ceux qui le croyaient lié par le pacte de Gastein il répondait dans un langage moins relevé que pittoresque et humoristique, mais dans tous les cas de façon à leur montrer qu’il n’était pas disposé à en rester là.

Deux choses le préoccupaient. Que ferait d’abord la France ? Si dans le voyage d’exploration qu’il fit vers cette époque à Biarritz M. de Bismark n’obtenait pas des assurances bien claires, s’il tournait vainement autour du secret qu’il aurait voulu connaître, opposant la réserve à la réserve, il revenait du moins avec cette