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inutilement ses forces. Au Salon de 1867, M. Bischoff nous a prouvé qu’il excellait dans les toiles restreintes ; l’exposition universelle montre qu’il pourrait échouer en cherchant des compositions plus vastes, pour lesquelles son talent ne paraît pas encore mûr. A côté de M. Bischoff, on doit nommer M. Alma-Tadéma, autour duquel on a essayé depuis quelques années de faire un peu de bruit. Ses tableaux sont étranges, il faut en convenir, ils attirent les regards par un côté précieux et par une prétention archéologique poussée aux dernières limites. Je prise peu, je l’avoue, ce genre d’archaïsme puéril qui consiste à rendre minutieusement des détails d’une exactitude au moins douteuse, qui n’ajoutent rien au mérite intrinsèque de l’œuvre, ne prouvent qu’une recherche exagérée des choses secondaires, et sacrifient forcément le sujet principal à l’accessoire. Ce n’est pas la raideur systématique des personnages, l’exécution en trompe-l’œil d’une broderie ou d’un bijou qui constituent la vérité historique ; il est bon de tendre toujours vers la réalité des costumes et de l’architecture, mais à la condition expresse de ne point lui subordonner le type humain, qui doit dominer tout et qui seul donne le vrai caractère des scènes représentées. L’art est plus large ; il s’inquiète médiocrement d’une boucle d’oreille, d’une sandale ou d’une cassette, pourvu que les attitudes soient humaines, vraies, normales et plastiques. Comme l’on dit vulgairement, M. Alma-Tadéma ne cherche que la petite bête ; on peut reconnaître qu’il la trouve souvent, mais on aimerait que ses visées fussent plus hautes et que son talent se proposât un but plus élevé. L’Éducation des petits-fils de Clotilde est le seul de ses treize tableaux qui révèle des qualités recommandantes ; il est moins tourmenté, moins surchargé, moins voulu que les autres, et c’est ce qui en fait la supériorité.

Il est un peuple qui se trouve écrasé sous l’iniquité de trois lourdes dominations et qui proteste par toute sorte de moyens de son irrésistible vitalité. Par ses héroïques insurrections, par ses travaux littéraires, dont les lecteurs de la Revue ont pu souvent apprécier la haute saveur, par les cours professés dans nos écoles publiques, la Pologne affirme son existence, que rien encore n’a pu diminuer. En peinture, l’école polonaise a une force peu commune force de concentration, de coloris, de violence contenue. A l’exposition universelle, malgré des classemens arbitraires, elle est représentée par trois artistes d’un talent éprouvé, et qui semblent dire, comme leur vieille chanson nationale : « Tant que nous vivons, la Pologne n’est pas morte ! » M. Henri Rodakowcki est connu depuis longtemps parmi nous. Son Portrait du général Dembicki (1852) lui valut une première médaille d’or décernée par le suffrage de