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CHRYSOSTOME ET EUDOXIE.


pour la prendre les clôtures de la basilique et violer l’immunité du sanctuaire. Ce fut le début de la terrible tragédie dont la mort du ministre fut le dénoûment. L’archevêque défendit le privilége de son église ; il prit fait et cause pour Pentadia, la réclama au nom de l’hospitalité de Dieu même, et finit par sauver sa tête. Pentadia reconnaissante vint se vouer à l’église qui avait été son refuge et à l’évêque qui avait été son sauveur. La fortune changeant, la protégée put devenir protectrice. Chrysostome lui écrivait un jour de ses propres adversités : « Tu as su réunir sur ton front toutes les couronnes, tu es un réconfort pour tes concitoyens dans la peine, un port de refuge au malheureux contre les flots de la persécution. » Nous ne connaissons Empructa que de nom ; mais l’affection que semble lui porter Chrysostome nous montre assez qu’elle était une digne compagne de Pentadia.

La gloire du corps des diaconesses n’appartenait point néanmoins à ces pieuses et courageuses femmes : de l’aveu de tout le monde elle était le lot d’Olympias, qui égalait Pentadia par le dévouement, Salvina par le rang dans le monde et l’illustration des alliances. Elle descendait par sa mère du célèbre Ablavius, préfet du prétoire sous Constantin. Après avoir été fiancée dans son enfance au nobilissime Constant, troisième fils de cet empereur, la fille d’Ablavius était montée sur le trône d’Arménie en épousant le roi Arsace, puis elle s’était unie en secondes noces à un noble romain, qui fut le père d’Olympias : telle était la parenté de la future diaconesse. La mort lui ayant enlevé coup sur coup tous ses proches, elle se trouva subitement orpheline et maîtresse d’une immense fortune lorsqu’elle était à peine adolescente. Une beauté merveilleuse, un caractère affable et doux, un esprit élevé, enthousiaste des grandes choses, firent bientôt de cette jeune fille le parti le plus recherché de Constantinople. L’histoire nous entretient longuement de ses perfections. « Olympias, nous dit l’évêque Palladius, qui vécut dans son intimité, Olympias possédait un cœur vraiment magnanime, et quand on la connaissait, quand on voyait uni à tant de beauté et de grâce ce mâle et ferme courage qui bravait les petitesses du monde, les craintes et les périls, on hésitait à l’appeler une femme. » À l’âge de prendre un époux, elle jeta son choix sur un jeune homme d’un grand mérite, comte du domaine privé à la cour de Théodose ; mais ce mariage ne dura que deux ans, et à la mort de son mari Olympias résolut de rester veuve.

Les empereurs romains, à cette époque surtout, s’arrogeaient une espèce de droit sur la destinée des filles ou veuves nobles et riches dont la fortune provenait ou de la faveur du prince ou des fonctions publiques que leurs pères ou leurs maris avaient exercées. Théodose