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demandait. C’est alors que lord Strafford de Redcliffe, ambassadeur d’Angleterre, dont l’influence était toute-puissante sur le divan de Constantinople, obtint un délai, alléguant qu’il devait attendre des instructions de Londres. À cette même époque, commençait à se montrer, sous forme de critiques dont la presse anglaise était l’organe, l’opposition du cabinet de Saint-James. Le rescrit fut donc ajourné, et l’envoyé du vice-roi, après une audience du sultan, ne rapporta au Caire qu’une lettre du grand-vizir, dans laquelle ce ministre exprimait toutes ses sympathies pour le canal maritime, dont l’utilité était explicitement reconnue par le gouvernement ottoman.

L’avant-projet des travaux et celui des statuts de la compagnie étant arrêtés, une commission scientifique internationale examina les plans et devis, et envoya des délégués en Égypte pour résoudre sur les lieux diverses questions. Bientôt après, le 5 janvier 1856, un second firman du vice-roi approuvait le cahier des charges, préambule indispensable à l’organisation de la société financière. Le capital social était de 200 millions répartis en quatre cent mille actions. Par son dernier firman, le vice-roi d’Égypte concédait à la compagnie la propriété des terrains bordant les rives du futur canal maritime et du canal d’eau douce, dont l’entreprise avait été résolue ; il s’engageait en outre à fournir pour l’exécution des travaux les ouvriers fellahs nécessaires, requis par corvées d’après le système suivi en Égypte pour tous les ouvrages d’utilité publique. Un contrat réglait l’organisation et la solde de ces travailleurs. Par cette clause, le vice-roi, à qui une part de 15 pour 100 sur. les revenus futurs de la compagnie était accordée, apportait un appui sérieux à l’œuvre naissante.

Fort de l’adhésion des hommes de science dont les études et les procès-verbaux avaient été publiés, de l’appui du vice-roi d’Égypte, que la Porte Ottomane ratifiait par des déclarations de toute sorte, sinon par un acte officiel, le concessionnaire, une fois le plan des travaux arrêté, visita les différentes contrées de l’Europe, s’adressant aux hommes d’état pour les édifier sur le caractère pacifique et en quelque sorte universel de la nouvelle société, aux capitalistes, aux chefs du commerce et de l’industrie pour leur exposer ses projets, les conditions de réalisation et les avantages de l’entreprise. Pendant le printemps de 1857, il parcourait ainsi et avec un succès non équivoque les principaux ports et centres, industriels de l’Angleterre, de l’Irlande et de l’Ecosse. Après être retourné en Égypte et à Constantinople, il revint en France, où il s’occupa d’organiser définitivement la compagnie.

Le 5 novembre 1858, la souscription au capital de 200 millions