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sible à l’agitation électorale, que la chambre était ternie par un impérieux devoir de donner cette année même au pays une bonne loi électorale. La présence du parti tory au pouvoir était une occasion d’en finir, et il fallait se garder de la laisser échapper. C’était aussi une bonne chance que la chambre fût placée sous la conduite d’un leader comme M. Disraeli, tacticien consommé, très rompu aux questions électorales qui l’occupent depuis longtemps, toujours maître de lui-même, d’une rare présence d’esprit, égayant les affaires par une aimable ironie, et conciliant les personnes par une modération sympathique. Le vote du bill de réforme est donc un grand succès pour celui qui en a dirigé l’élaboration ; il satisfait la grande majorité du peuple anglais ; il met un terme aux tumultes d’une agitation qui n’eût point continué sans devenir acre et violente. L’Angleterre est ainsi débarrassée d’un grave souci intérieur. Elle peut avec sécurité s’appliquer aux progrès de toutes ses libertés. Elle peut applaudir à des harangues aussi élevées par l’idée, aussi pénétrées de probité d’esprit et de chaleur d’âme que celle où M. Gladstone vient de proclamer les services éminens que la presse libre rend à la civilisation contemporaine.

Les malheurs de famille se sont unis aux échecs politiques pour accabler la maison d’Autriche. Une jeune princesse périssant dans les flammes au moment où un frère de l’empereur tombait sous les balles mexicaines, voilà les derniers coups qui ont frappé cette famille souveraine. Cet acharnement d’infortune dépasse le cercle des douleurs privées et appelle un mouvement de sympathie générale autour de la maison de Habsbourg. Le sort l’a regardée d’un bien mauvais œil depuis quelques années. Il lui doit des adoucissemens. Les trouvera-t-elle dans l’œuvre entamée de la réorganisation de l’empire sous une constitution quasi fédérale ? Les informations d’observateurs sympathiques à l’Autriche encouragent peu cette espérance. La folie de l’esprit de nationalité, excitée par des propagandes russes, s’empare des populations slaves de l’empire autrichien. Les différences de rite, la diversité des dialectes, les antagonismes fondés sur les dissidences religieuses ne seraient plus, dit-on, des obstacles au rapprochement des familles de la race slave. Cet obscur Orient, échauffé par la civilisation artificielle de la Russie, pleine de rêves et d’ambitions, semble nous préparer par momens des menaces mystérieuses. L’Autriche est la première exposée au débordement du génie slave ; elle n’a point cessé son œuvre militante. Que fait cependant l’indolente et subtile Italie, qui s’est formée des premiers désastres de l’empire autrichien ? Elle dort, elle discute du partage et de la réalisation des domaines ecclésiastiques. Elle rouvre la vieille controverse sur les biens de mainmorte. C’est un grave problème social et politique qu’on agite ainsi — dans le parlement italien. On met là en présence les théories contraires du droit civil et du droit canon sur le domaine tem-