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lorsque par le cours naturel de son récit il fut amené à parler du mariage contracté en Amérique par le prince Jérôme Bonaparte. Il reçut alors, ou plutôt ses éditeurs reçurent pour lui du fils du prince Jérôme et d’Elisabeth Patterson une protestation qui est insérée au dix-septième volume de ce bel ouvrage. Aujourd’hui, et c’est, hélas ! le seul rapport que j’aie avec M. Thiers, je reçois, ou plutôt vous recevez, monsieur le directeur, une réclamation du fils né du mariage du même prince Jérôme avec son altesse la princesse Catherine de Wurtemberg. Ces réclamations ne prouveraient-elles point qu’il y a parfois dans l’étude de nos temps modernes des sujets d’une nature si délicate, qu’il est impossible, quelque soin qu’on y apporte, de les relater même brièvement et en toute conscience sans exciter bien malgré soi de vives et honorables susceptibilités. Je m’étais presque flatté de n’en provoquer aucune et pour mieux y parvenir je m’étais abstenu d’exprimer aucune opinion quelconque sur la validité ou la non-validité du mariage contracté à Baltimore par le prince Jérôme. Je n’ai fait que transcrire le jugement qu’en avait alors porté le pape Pie VII. D’appréciations personnelles, il n’y en a nulle trace dans mon étude ; je me suis volontairement borné à exposer les faits tels qu’ils sont énoncés dans les lettres de l’empereur, dans celles du roi Jérôme et dans le mémoire si habilement rédigé par l’émitienf conseil du prince, M. Allou. De ces faits, son altesse impériale n’en contredit d’ailleurs aucun. Elle m’accuse uniquement d’avoir omis, dans un chapitre consacré aux événemens de 1805, les événemens qui se seraient produits deux ans plus tard, en 1807, au moment du mariage du roi de Westphalie avec la princesse Catherine de Wurtemberg. Un tel reproche est fait pour étonner tous les historiens de l’Europe. L’article contenu dans la Revue de ce jour ne va lui-même que jusqu’à la moitié de l’année 1806. Je demande à son altesse impériale un peu de patience, et, si elle veut bien me suivre jusqu’au bout de ce trop long travail, nous arriverons à cette année 1807 ; mais peut-être ne serai-je pas assez heureux pour me trouver alors parfaitement d’accord avec elle. Le prince Napoléon dit positivement qu’à cette époque « le saint-père avait reconnu le peu de fondement de ses premiers scrupules, et qu’il avait donné la bénédiction religieuse au second mariage du roi Jérôme. »

Voilà, je l’avoue, la première nouvelle qui m’en parvienne. Si les choses se sont en effet ainsi passées, nul doute que je ne sois fort empressé de le reconnaître et de le bien constater quand le moment sera venu ; mais pour cela il est absolument nécessaire que son altesse impériale veuille bien avoir la bonté de me venir efficacement en aide, car le malheur veut que les documens qui sont actuellement en ma possession ne s’accordent point avec la version du prince. Je sais bien, et le prince en cela ne m’a rien appris, que, lors du mariage du roi Jérôme, sa sainteté s’empressa d’écrire à l’empereur des Français pour lui