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trois millionième d’argent mêlé à six fois la même quantité de cuivre et à huit fois la même quantité de plomb. Une faible proportion d’argent se précipite sur la carène des navires par suite du courant magnétique établi entre le, doublage de cuivre et l’eau de mer environnante. Enfin, dans des chaudières de bateaux à vapeur qu’on avait alimentées d’eau de mer, il s’est trouvé de l’arsenic. Il est vrai que ces diverses substances n’existent dans l’eau qu’en proportion infinitésimale, et c’est uniquement par des moyens indirects que la chimie parvient à les révéler.

Le sel, cet élément si important dans la composition de l’eau de mer, jouerait-il aussi, comme le pense Maury, le principal rôle dans la coloration bleue de l’océan ? Le gulfstream des côtes américaines, que le savant géographe cite en exemple pour appuyer sa théorie est bien à la fois d’une salinité plus forte et d’un bleu plus foncé que les eaux environnantes. De même la Méditerranée, supérieure à l’Atlantique par sa richesse en ingrédiens salins, offre presque toujours une nappe d’un magnifique azur à laquelle ceux qui ont vu les flots d’un vert glauque des mers septentrionales peuvent à peine habituer leurs yeux. Toutefois la minime différence de salure qui existe entre la Méditerranée et l’Océan ne saurait expliquer un contraste de coloration aussi frappant, d’autant moins que nombre de lacs intérieurs, où l’analyse ne découvre pas une particule de sel, ont des eaux d’un bleu semblable à celui du golfe de Gênes ou de la grotte de Capri. D’un autre côté, Tyndall se croit autorisé à conclure des observations qu’il a faites sur les lacs de la Suisse, que les diverses nuances de l’eau sont dues principalement à la quantité plus ou moins grande de corpuscules en suspension sur lesquels vient frapper la lumière. C’est là une hypothèse que des recherches futures auront à confirmer ou à détruire ; quoi qu’il en soit, les navigateurs ont constaté d’une manière générale que les mers de la zone torride sont celles qui offrent le bleu le plus intense, et que dans la direction des pôles l’eau prend graduellement une teinte verdâtre. On peut en inférer que la réfraction des rayons lumineux, beaucoup plus vifs sous les latitudes tropicales, est le principal agent dans la coloration de la mer. La lumière qui se brise en pénétrant dans les profondeurs de l’eau lui donne cette belle couleur bleue, supérieure en éclat à celle de l’atmosphère, tandis que les rayons reflétés à la surface varient incessamment l’aspect des flots, et mêlent à l’azur permanent de la mer les nuances les plus délicates, modifiées à chaque instant suivant lia hauteur du soleil, la pureté de l’air, la forme et la couleur des nuages.

Quant à la transparence des couches liquides, elle ne semble