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en toute saison dans la partie de la mer des Antilles qui se rétrécit vers le golfe d’Uraba : là, les gonflemens de l’onde que l’on voit accourir, puis se profiler à droite et à gauche et s’éloigner rapidement, sont aussi droits que les ados d’un champ et se prolongent jusqu’à perte de vue de l’un à l’autre horizon.

La hauteur des vagues n’est point la même dans toutes les mers ; elle est d’autant plus considérable que le bassin est plus profond, que la surface en est plus librement parcourue des vents, et que l’eau, moins salée et par conséquent moins pesante, donne plus de prise aux courans atmosphériques. Ainsi, à égalité de surface, les eaux du Lac-Supérieur sont soulevées en vagues plus hautes que celles d’un golfe de la mer barré du côté du large par des îles et des bancs de sable. A égalité de salure, ce sont les bassins les plus étroits qui doivent présenter les vagues les plus courtes et les moins hautes. Les flots de la Caspienne ne sont point comparables à ceux de la Méditerranée, qui de leur côté sont de beaucoup dépassés en hauteur par ceux de l’Atlantique du nord, et ceux-ci à leur tour n’atteignent point à la hauteur des vagues de la mer antarctique, car celle-ci est l’océan par excellence recouvrant de ses eaux tout un hémisphère.

D’après l’amiral Smyth, qui connaissait si bien la Méditerranée, les vagues de tempête y ont de 4 à 5 mètres et même 5 mètres et demi de hauteur verticale au-dessus du creux de l’eau ; il a vu des ondes tout à fait exceptionnelles se dresser à 9 métres de hauteur ; mais les vagues moyennes soulevées par les grands vents ont seulement de 3 à 4 mètres. Dans une traversée que le célèbre marin Scoresby fit en 1847 de Liverpool à Boston, il mesura des vagues atteignant 8 et 9 mètres, et la moyenne de toutes ses observations donna pour les grandes lames la hauteur de 5m 80. A son retour, en 1848, il trouva une moyenne de 9m 14 pour toutes les vagues mesurées, et quelques-unes d’entre elles s’élevèrent à 13m 10 au-dessus de l’intervalle le plus profond. D’autres navigateurs donnent des évaluations analogues pour les hautes crêtes des flots dans l’Atlantique du nord ; quant à la moyenne d’élévation à laquelle atteignent les lames, elle est beaucoup moins considérable.

Dans l’Atlantique du sud, les hauteurs des ondes sont certainement plus fortes que dans les parages du nord. Un grand nombre de marins ont vu l’eau se relever à 15, 16 et 18 mètres au large du cap de Bonne-Espérance, là où l’Atlantique et l’océan des Indes confondent leurs bassins. Dumont d’0rville affirmait même avoir rencontré des vagues de 83 mètres de hauteur au fond desquelles le navire descendait comme dans une vallée, et M. Fleuriot de L’angle atteste la vérité de cette assertion : ce sont bien là les