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Jean une masse d’accusations vraiment formidable. Cependant, l’accusé s’obstinant à ne point comparaître et l’empereur ne prenant aucune mesure pour l’y forcer, Théophile passa à l’audition des témoins. Sept furent entendus, appartenant au clergé métropolitain, et ils déposèrent avec une extrême acrimonie. C’était Arsace, Atticus et Elpidius, dont les deux premiers occupèrent après Chrysostome le siége qu’ils avaient contribué à rendre vacant. Tout le monde était impatient d’en finir ; Arsace et Atticus, aidés de deux autres prêtres, Eudémon et Onésime, demandaient à grands cris qu’on se hâtât. « La culpabilité de Jean étant surabondamment prouvée, il n’y a aucun intérêt, disaient-ils, à prolonger ces interrogatoires. » Enfin dans sa douzième séance le concile déclara qu’il allait procéder au jugement. Théophile jusqu’alors avait présidé. Quoique récusé par l’archevêque, il n’en avait pas moins conduit toute la procédure et dirigé les débats ; mais, le moment du jugement étant venu, il craignit que sa présidence ne fournît un moyen d’attaque ou même de cassation de la décision synodale près d’un prince aussi timoré qu’Arcadius. Il se fit donc remplacer par Paul d’Héraclée, mais il ne s’abstint pas de voter : les trois autres récusés, Antiochus, Acacius et Sévérien, ne s’abstinrent pas non plus. Lorsqu’on passa au vote, Paul prit les voix de tous les évêques en commençant par un certain Gymnasius et finissant par Théophile. Les votans se trouvèrent au nombre de 45 au lieu de 36 qu’ils étaient à l’ouverture de la session. Ils s’étaient accrus successivement de quelques nouveaux évêques du dehors et de quelques déserteurs de Constantinople. Chrysostome fut condamné à la déposition, et les faits de lèse-majesté contenus dans le procès furent renvoyés à la connaissance du prince.

La déposition prononcée, le synode en donna avis immédiatement au clergé métropolitain, pour le dégager des liens d’obéissance envers son supérieur déposé, et un rapport, ou, suivant le terme officiel, une relation sur les opérations synodales fut envoyée aux deux empereurs Arcadius et Honorius, souverains communs et unanimes de l’univers, romain. L’évêque expulsé de Nicomédie, Gérontius, et deux autres Asiatiques chassés comme lui, Faustinus et Eugnomon, profitèrent de l’envoi de ce rapport pour adresser aux princes un récit de leur aventure et une plainte contre les procédés illégaux de Chrysostome. Le double de la relation destiné à l’empereur d’Orient commençait par ces mots qui regardaient particulièrement Arcadius. « Attendu que Jean, accusé de certains crimes et sentant qu’il était coupable, a refusé de venir se justifier devant nous, et que dans ce cas les lois canoniques prononcent la déposition, nous l’avons déposé. Toutefois les libelles