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Ainsi qu’il était facile de le prévoir, un peu de bruit s’était produit, surtout dans le monde ecclésiastique, autour du nouveau catéchisme, à l’élaboration duquel trop de personnes avaient pris part pour que, par suite des indiscrétions commises, il ne fût pas à l’avance un peu connu, au moins dans ses parties les plus essentielles. Le chapitre relatif aux devoirs des Français envers Napoléon, leur souverain, avait en particulier donné lieu, on le devine, à toute sorte de commentaires. Il s’en fallait de quelque chose que les membres du clergé, même parmi l’épiscopat, donnassent tous également leur entière approbation à cette singulière leçon du quatrième commandement. Aux yeux de quelques-uns, l’initiative prise par le pouvoir civil dans une affaire de cette nature était un véritable empiétement sur les fonctions du sacerdoce, et pouvait avoir les suites les plus fâcheuses. « Est-ce à lui, écrivait à l’un de ses amis M. d’Aviau, archevêque de Bordeaux, est-ce à lui de se mêler de ces questions-là ? Qui lui en a donné la mission ? À lui les choses de la terre, à nous les choses du ciel. Bientôt, si nous laissons faire, il mettra la main à l’encensoir, et peut-être voudra-t-il plus tard monter à l’autel. En vérité, cela ne se peut pas. Principiis obsta, sero medicina paratur…..[1]. » Sans s’exprimer aussi vertement que M. l’archevêque de Bordeaux, d’autres prélats avaient au fond même répugnance à faire enseigner dans leur diocèse les préceptes contenus dans le texte de la septième leçon du quatrième commandement ; mais le moyen d’avouer une pareille répugnance et d’en exposer publiquement les motifs ! Dans le clergé officiel, personne n’y songea un seul instant. On se rejeta d’un autre côté, et les critiques se portèrent sur certains points qui pouvaient donner également prise et se discuter avec moins de péril.

Napoléon, depuis qu’il s’était fait inspirateur de mandemens et rédacteur de catéchisme, n’avait pas si bien épousé les sentimens de sa nouvelle profession qu’il n’eût gardé encore quelque chose de l’ancien levain et retenu quelques façons de penser propres aux gens du siècle. C’est ainsi qu’il n’acceptait pas volontiers la doctrine « hors de l’église point de salut. » Bossuet, son évêque de prédilection, l’avait bien avancé dans la troisième leçon de la seconde partie de son catéchisme ; mais Bossuet cette fois, avait tort. L’empereur n’avait pas voulu que l’identité annoncée du nouveau catéchisme avec l’ancien ouvrage de l’évêque de Meaux fût poussée jusqu’à ce point. Il n’était donc gestion de rien de semblable dans

  1. Histoire de Mgr d’Aviau Du Bois de Sansay, par M. l’abbé Lyonnet, p. 549. Le courage de M. d’Aviau n’alla pas susqu’à ne point approuver le nouveau catéchisme. Il ne s’agissait de rien de semblable en ce temps-là ; mais sous différens prétextes ce prélat, dont nous aurons à louer plus tard la tranquille énergie, trouva moyen de se dispenser d’en faire usage dans son diocèse.