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bovine, la situation des deux pays doit être à peu près la même. Le recensement français non publié donne pour 1857 12,765,000 têtes au total, ce qui faisait sur le recensement précédent de 1852 une légère augmentation, le chiffre étant à cette dernière époque de 12,150,000. En Prusse, le dernier relevé porte 5,837,000, sans compter les veaux au-dessous de six mois. En ajoutant cette catégorie, ou arriverait au chiffre d’environ 6,500,000, soit de part et d’autre une tête par 4,2 hectares et par 2,9 habitans, Quant aux produits, ils doivent aussi être équivalens. L’espèce bovine française, étant généralement plus grande, donne plus de viande ; mais les vaches de la Prusse, naturellement plus lactifères et recevant dans un climat humide beaucoup plus de fourrages, livrent plus de lait. Le seul point où la France l’emporte considérablement, c’est la volaille, dont le produit annuel en œufs seulement est porté à 100 millions de francs.

Si, pour établir une comparaison générale, nous ramenons les différens types d’animaux à celui d’une tête de gros bétail, nous trouvons pour la Prusse un avantage assez marqué, car la proportion y est de 100 têtes par 214 hectares et 138 habitans ; elle est pour la France de 100 têtes par 267 hectares et par 185 habitans, ce qui signifie qu’en Prusse la même étendue de terrain entretient plus de bétail, et que la population a plus d’animaux domestiques à sa disposition pour répondre à ses divers besoins. Quand M. Royer, inspecteur-général de l’agriculture, exécutant en 1847 un voyage agricole en Allemagne[1], établit une comparaison semblable pour les chiffres de 1837, les derniers qui fussent à sa disposition, il arrivait à un résultat inverse. La France alors possédait l’équivalent d’une tête par 23 ares, la Prusse une tête seulement par 26 ares, ce qui constituait une différence d’un huitième à l’avantage de la France. En prenant le poids d’un mouton à 40 kilogrammes, la France entretenait 175 kilogrammes de viande par hectare, la Prusse seulement 153. Si aujourd’hui la balance penche du côté de l’Allemagne, ce n’est pas que la France ait précisément rétrogradé, sauf pour les moutons ; mais elle est restée stationnaire, tandis que les peuples du nord avançaient à grands pas. Il y a vingt ans, l’auteur, que nous venons de citer prévoyait ce résultat. Après avoir dépeint l’agriculture prussienne sous les plus tristes couleurs, très exactes à cette époque, il ajoute : « Il ne nous semble pas douteux, que la Prusse fait pour l’amélioration des races de chaque espèce des progrès plus rapides, plus généraux et surtout plus intelligens que la France. »

  1. L’Agriculture allemande, par M. Royer, inspecteur-général de l’agriculture (1847).