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étrangère qu’on appréhendait en ce moment, la Bavière, le Wurtemberg et Bade concluaient avec la Prusse des conventions, nécessairement tenues secrètes alors, qui plaçaient toutes leurs armées sous le commandement direct du roi Guillaume. A partir de ce jour, l’union militaire était faite, et c’est la seule qui puisse inquiéter les puissances voisines. Le 8 juillet dernier, un autre traité a été signé, qui établit l’unité économique. Le Zollverein est reconstitué sur la base d’un parlement unitaire où se rassembleront les représentans de toute l’Allemagne, de façon qu’une décision prise par la majorité fasse loi, et qu’il ne puisse plus dépendre du veto d’un seul état de rompre une union indispensable aux progrès matériels de tous. C’est sans doute en vue de ces conventions que l’article IV du traité de Prague portait que « le lien national à établir entre les états du sud et la confédération du nord serait réglé par une entente ultérieure entre les deux parties. » La séparation absolue du nord et du sud en deux tronçons n’a donc jamais existé, et n’a pu être admise par quiconque s’est donné la peine de lire le texte du traité de Prague. Un « lien national » sera établi entre le nord et le sud ; une alliance offensive et défensive est conclue entre eux ; le système militaire prussien sera introduit dans le midi, et en cas de guerre ses contingens se confondront avec l’armée prussienne ; un parlement douanier unitaire siégera à Berlin ; des conventions au sujet des monnaies, des lois civiles et commerciales, ne tarderont pas à établir l’uniformité complète. En présence de ces faits, quelle importance conserve encore la prétendue barrière du Mein, et quel intérêt l’étranger peut-il avoir à ce que cette uniformité s’établisse par des conventions plutôt que par des lois votées dans une diète commune ?

Quoi qu’il en soit, le nord et le sud finiront par se ressouder complètement, nul ne se fait illusion à cet égard. C’est le vœu de l’immense majorité de la population des deux côtés du Mein. L’adresse de la chambre des députés de Bade exprimait récemment ce sentiment de la façon la plus nette. « La nation allemande, disait ce document, ne retrouvera son calme et sa paix à l’intérieur qu’après avoir trouvé la forme définitive suivant laquelle il sera possible d’organiser plus complètement le lien national nécessaire entre la confédération du nord et les états du sud, de fournir ainsi à l’Allemagne des conditions de vie et de bien-être ; de même l’Europe n’arrivera au plein sentiment d’une paix assurée que lorsque la réorganisation de l’Allemagne sera accomplie en-deçà comme au-delà du Mein, car l’unité allemande signifie la garantie du droit naturel, le respect de la liberté des peuples, le progrès pacifique de la civilisation et le réfrènement nécessaire de la politique de