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d’une armée de la foi recrutée d’hommes étrangers à l’Italie ? Obtenons-nous du pape de suffisans ménagemens ? Que dire de la lettre adressée par sa sainteté à M. Dupanloup, de cette intervention empressée dans un dissentiment que le zèle de M. l’évêque d’Orléans vient de faire éclater chez nous entre l’épiscopat et le ministère de l’instruction publique, entre le trône et l’autel, à propos des efforts tentés par l’université pour offrir aux femmes et aux jeunes filles les avantages d’un enseignement supérieur donné par des professeurs laïques ? Ces empiétemens ecclésiastiques sur les principes de l’enseignement de l’état, qui nous paraîtraient ou légitimes ou indifférons, si l’église libre vivait dans l’état libre, devraient-ils venir d’un pouvoir religieux dont nos baïonnettes protègent l’établissement temporel ? La politique française, si elle ne consent point à répudier ses œuvres, doit à l’Italie quelque marque d’alliance qui fasse au moins compensation et contre-poids aux services que nous rendons à la papauté temporelle.

L’Autriche avec son livre rouge a fait connaître agréablement à l’Europe la modestie et la réserve de sa présente politique étrangère. L’Autriche en a fini avec la phase des déchiremens au dehors et au dedans, de l’unité inflexible et oppressive, des rivalités militaires poussées et soutenues à outrance. Séparée de l’Allemagne, l’Autriche a pris les airs d’un état oriental, et s’attache à la paix pour mettre en valeur et les qualités morales des races diverses dont elle est formée et les abondantes ressources de ses territoires. Elle ne se détourne pas seulement des préoccupations belliqueuses, elle ajourne encore la période des alliances intimes et actives. Dans cette phase, les allures de l’Autriche sont loin de déplaire à la France, qui a de grands intérêts financiers et industriels engagés dans cet empire. C’est en effet le seul pays étranger où les capitaux français n’ont point cessé d’obtenir une rémunération légitime. Le succès récent de l’emprunt hongrois a été l’effet naturel de cette sympathie qui devient plus sensible, lorsqu’il s’agit du royaume des Maggyars et le fruit aussi des soins intelligens du commissaire que le gouvernement hongrois avait chargé à Paris de la représentation de ses intérêts. A mesure qu’elle s’efforce de rendre la vie à ses provinces orientales, la cour de Vienne rencontre, vers ses limites à l’est et vers les populations chrétiennes attachées par un lien nominal à l’empire ottoman, l’active propagande panslaviste, les manœuvres ostensibles ou secrètes de la Russie. Il y a là pour l’Autriche une pierre d’achoppement où elle se heurte à sa frontière orientale. Récemment le panslavisme s’est traduit à Prague par des manifestations désordonnées de la population tchèque. Du côté des principautés, on a parlé de bandes rassemblées pour envahir la Bulgarie. On signalait la présence d’un agent russe fort connu et qui a disparu sans qu’on sache ce qu’il est devenu. On assure que le prince Charles, qui appartient à la branche catholique de la mai-