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tans et des sénateurs. Le général n’est formel que sur un point. S’il est élu, il ne distribuera point les places en rémunération des services politiques. Il croit à la nécessité d’une réforme du service civil aux États-Unis, et ne jugera les fonctionnaires que sur leur moralité et leur capacité. Une telle modération, une telle réserve, une telle impartialité chez un homme politique des États-Unis est un rare phénomène que nous avons tenu à signaler. La tactique du général Grant fera sans doute la conquête des esprits modérés ; mais elle est peu conforme aux traditions américaines, et il faudra voir si le général y persévérera jusqu’à la réunion des conventions. L’organisation des partis dans la grande république américaine est la vraie constitution vivante dérivée des libertés consacrées par la constitution écrite. Il n’y a pas d’apparence que les partis aux États-Unis désertent leurs traditions. Le conseil national de la ligue de l’Union a décrété dans une de ses récentes séances qu’il est absolument opposé à toute déviation des principes sacrés de son organisation ou du parti républicain. La ligue prie la convention républicaine et nationale avec respect, mais avec ardeur et fermeté, de ne point désigner pour la présidence des États-Unis en 1868 tout homme qui ne donnerait pas des garanties incontestables de sa sincère fidélité à la cause de l’Union et de la liberté, qui n’admettrait pas l’égalité des droits de tous les citoyens et le suffrage universel. La lettre du beau-frère du général Grant n’est qu’une prise de position de la candidature. Quand on en viendra au jour de la désignation des candidats par les conventions, il faudra bien que l’illustre général fasse publiquement son choix entre les diverses plates-formes. e. forcade.



REVUE DRAMATIQUE.

Gymnase. Miss Suzanne, comédie en quatre actes, par M. Ernest Legouvé. — Madame Desroches, comédie en quatre actes, par M. Léon Laya. — Théâtre de Cluny : Les Sceptiques, comédie en quatre actes, par M. Félicien Mailefille.

Tout le monde peut dire ce que seront devenues dans cinquante ans la plupart des pièces d’aujourd’hui ; il y aurait une insigne présomption à vouloir prophétiser quel sera leur sort d’ici à quinze jours. Avec un parterre que l’on a fini par accoutumer au mutisme d’un régiment sous le feu de l’ennemi et à recevoir sans sourciller l’averse prolongée des plus froides plaisanteries, le public est un sphinx. Nous sommes donc réduits, sur les pièces nouvelles, à exposer notre sentiment tout pur et à en déduire simplement les raisons. Préjuger le succès de ces pièces par le nombre des spectateurs qu’elles avaient aux premières représentations, ce serait vouloir se tromper à coup sûr, car il existe toujours à Paris une population dont la curiosité ne veut rien laisser passer. Où