Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 73.djvu/982

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

revenus ni au système suivi depuis cent ans dans les provinces, on arriva peu à peu à percevoir les taxes en argent, et on n’hésita point à chercher une amélioration dans les recettes par des contributions indirectes, les seules que le peuple le plus soumis supporte facilement. Les fermes de diverses natures, les droits d’enregistrement, de mutation et de patente, enfin l’impôt foncier des grands centres, supérieur à celui des champs de culture, furent successivement augmentés ou établis depuis 1863. En même temps l’on abaissait l’impôt des milices de un homme sur sept a un sur quatorze : le régime des corvées était adouci par la faculté de rachat et la facilité pour les villages de compter par journées de travail dû pendant l’année au lieu de fournir un nombre d’hommes fixe à la première réquisition. On évitait par là de dépasser les charges que peut supporter une population en pleine voie de prospérité, et l’on faisait correspondre les accroissemens d’impôts indirects à une augmentation dans le bien-être de tous et au développement du mouvement commercial. Aussi la statistique du port de Saigon accusait-elle pour l’année 1867 la présence de 887 navires ou barques représentant un déplacement de 500,000 tonneaux, dont 260,000 pour l’importation, et une valeur de 55 millions de francs, dont 30 d’importation. Les budgets de recettes locales des années 1864, 1865, montaient de 4 millions à 4 millions 1/2 ; au mois d’avril 1867, les comptes définitifs arrêtaient l’exercice à 5 millions, sans compter la valeur des corvées, estimées 900,000 francs et appliquées aux travaux publics. Durant notre occupation restreinte, les dépenses nécessaires de la colonie s’élevaient à 5 millions, y compris une subvention de 1 million qu’elle consacrait au service de la marine. Le ministère de son côté restait grevé de 15 à 20 millions pour l’entretien d’une garnison de 8,000 soldats et marins, d’une flottille de 26 navires, pour la construction d’ateliers, de casernes et d’hôpitaux. L’écart entre les dépenses générales de la colonie et les recettes locales avait été ramené dans ces derniers temps à 14 millions ; il pouvait même être réduit à 8 millions en faisant supporter par la métropole certaines dépenses de matériel et de solde. On prévoyait des augmentations certaines de revenus dans l’avenir, soit par l’augmentation du nombre des habitans, soit par les défrichemens et les taxes indirectes ; mais les calculs les plus sages, basés sur les élémens de prospérité dont on disposait dans les trois provinces, ne pouvaient faire espérer, en 1877 par exemple, plus de 10 millions de recettes. Ainsi, en dix ans, les ressources de l’état doublaient ; mais les dépenses se maintenaient forcément au même niveau, puisque la garnison et la marine gardaient un effectif aussi fort et que les édifices de l’état étaient pour