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ruisseaux encombrés de feuilles et d’autres débris organiques ne donnèrent plus qu’une eau croupie et nauséabonde. Cependant les brahmines ne prirent pas la peine de remédier à ces maux ; ils étaient trop fiers ou trop indolens pour de telles occupations.

L’éducation morale et intellectuelle luttera-t-elle avec succès contre ces tendances fâcheuses de la société hindoue ? Le gouvernement anglais le croit, et il s’est donné beaucoup de peine pour favoriser l’instruction des jeunes indigènes. « On ne peut parcourir l’Inde, dit miss Mary Carpenter, sans être frappé de surprise et d’admiration à la vue du nombre des écoles et de la bonne direction des études qui y sont faites. L’instruction que l’on découvre chez les natifs avec lesquels on a l’occasion de causer, des écoles bien tenues et remplies d’enfans studieux, de beaux collèges où se rendent les élèves des provinces les plus éloignées, des universités ouvertes à tout le monde, sans distinction de couleur ni de croyance, et où affluent les candidats aux honneurs académiques, tout étonne. On dirait à première vue que le gouvernement a plus souci d’instruire les enfans d’une colonie lointaine que ceux de la métropole. » Si l’on va au fond des choses, le résultat est un peu moins satisfaisant. Les élèves que l’on questionne avouent crûment qu’ils ne se donnent tant de peine qu’avec la perspective d’obtenir plus tard un emploi du gouvernement. Les interroge-t-on sur les programmes de leurs études, leurs réponses font plus d’honneur à leur mémoire qu’à leur intelligence. Les bibliothèques scolaires ne sont pas fréquentées. Le but des études est de passer avec succès certains examens qui ouvrent l’accès de certaines carrières, et non d’élargir le domaine de l’intelligence. Après tout, on ne peut en faire un gros crime à ces jeunes Hindous ; il n’est pas besoin d’aller si loin pour en voir autant. Le fait important à signaler, c’est que ces établissemens d’instruction fournissent déjà des médecins et des administrateurs indigènes pourvus des mêmes grades universitaires et éprouvés par les mêmes examens que leurs confrères d’Europe. La société native apprend à se passer des Anglais. Le temps est encore loin où elle pourra se suffire à elle-même ; mais n’est-ce pas assez que la race indigène ait obtenu déjà quelques succès de ce genre pour démontrer qu’elle marche d’un pas rapide vers un. état meilleur, et qu’elle saura vivre et se faire une place à côté de ses fiers conquérans ?


H. BLERZY.



M. LE COMTE D’HAUDERSART.


Un de ces coups de foudre qui troublent et confondent même les moins timides et les plus familiers à l’idée de la mort a récemment brisé la vie la plus réglée, la mieux conduite, la plus exempte d’imprudence et d’excès, une de ces vies toutes de prévoyance qui sembleraient