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en un mot, des germes d’entreprises, de bénéfices et de salaires. Un tel programme conduit loin. Les voies et moyens ordinaires n’auraient pas suffi à la dépense ; à côté des sources naturelles de la fiscalité, il fallait établir des courans de capitaux particuliers. Ici vent se faire sentir l’inspiration et l’influence personnelle de M. Fould, ministre d’état à cette époque, financier très habile sans aucun doute, cherchant comme le virtuose la difficulté pour la vaincre, plein d’ingéniosité, d’entrain, de prestige, mais faiblement pourvu de la prévoyance qui constitue l’homme d’état. Nous allons voir se dérouler la série des expédiens indispensables pour élever les recettes au niveau des dépenses, emprunts sous toutes les formes, directs ou indirects, avoués ou dissimulés, mais portant toujours le signe caractéristique de l’emprunt, le sacrifice de l’avenir au présent.

Les régimes antérieurs avaient laissé des valeurs de portefeuille, entre autres des créances à longs termes sur les compagnies de chemins de fer. La loi de 1842, destinée à provoquer l’établissement des grandes lignes, mettait à la charge de l’état l’achat des terrains, les terrassemens et les ouvrages d’art. On avait imaginé cette combinaison qui nous étonne aujourd’hui pour venir en aide à l’industrie privée, dont le crédit n’était pas encore fondé ; mais les dépenses faites par l’état étaient consenties à. titre d’avances dont les compagnies concessionnaires devaient se libérer à la longue au moyen d’annuités échelonnées sur la durée des exploitations. Quelques lignes avaient reçu en outre des secours directs, des prêts en argent, dont elles étaient débitrices, ou bien encore l’état avait revendu à terme quelques petits tronçons dont la débâcle de plusieurs compagnies en 1848 l’avait rendu propriétaire. Ces diverses transactions avaient constitué une masse de créances, résultats des sacrifices faits-par les gouvernement antérieurs, et dont il serait juste de décharger leur compte. Partie de ces créances avait été recouvrée avant 1852 ; le régime impérial a épuisé le reste : de 1852 à 1865, il a encaissé par voie d’escompte une somme de 110,512,459 fr., avancés dans le cours des dix années précédentes sous formes de prêts d’argent ou de travaux. Ajoutons-y 11,620,290 francs provenant du cautionnement d’une ancienne compagnie déchue.

En 1848, le gouvernement, menacé d’une suspension des travaux sur la ligne de Paris à Lyon, avait dû retirer la concession, non pas sans indemniser les actionnaires des dépenses qu’ils avaient faites. Cet arrangement avait rendu nécessaire l’inscription d’une rente ; mais nous avons déjà dit qu’elle était à peu près compensée par le revenu du chemin, exploité au profit de l’état. Après le 2 décembre, un des premiers actes du régime nouveau est la vente de