Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 77.djvu/337

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lord Barrington, les circonstances de sa nomination dans l’Inde. J’ai aussi recueilli d’importans extraits des livres qu’il a étudiés avant l’âge de vingt-trois ans, comme Bacon, Locke, Montesquieu, etc., etc., preuves de l’éducation qu’il avait de bonne heure achevé de se donner lui-même. Il avait aussi coupé dans les journaux les articles écrits par lui dès 1763 et les avait rassemblés en volume, en séparant souvent de la même manière des lettres particulières de Junius quelques-unes des autres lettres qui lui sont attribuées.

« Mais ma plus précieuse découverte a été sa secrète publication anonyme de divers pamphlets pleins de force et d’ironie entre 1764 et 1771. Le nom de l’auteur en est resté jusqu’à présent un aussi grand mystère que l’identité de Junius. J’ai fait récemment cette découverte presque par hasard, en trouvant deux manuscrits originaux d’une partie d’un de ces pamphlets et reconnaissant l’écriture pour être incontestablement celle de Francis, quoiqu’on partie déguisée. Tous ces documens font entièrement disparaître la difficulté qu’on élevait sur la capacité de Francis et son habitude d’écrire antérieurement aux débuts de Junius.

« Parmi mes dernières acquisitions se trouvent des dissertations manuscrites très bien faites et destinées à la publication, sur le caractère de tous les rois d’Angleterre, de Jacques Ier à George III inclusivement, en y comprenant Cromwell ; une analyse très forte de l’esprit et de la conduite publique de G. J. Fox, du second Pitt, et d’autres de ses contemporains, ainsi que les portraits de plusieurs de vos rois de France.

« En conséquence, j’ai dû recomposer et récrire une grande partie de ma biographie, mais je ne le regrette pas. Ma Vie sera en effet maintenant beaucoup plus autobiographique, et par suite elle aura beaucoup plus de valeur et de droit à la confiance. La grande question de l’inconsistance dans la manière de traiter Chatham, je puis pleinement la résoudre. Tous ces matériaux joints à ceux dont je vous ai fait connaître l’existence chez moi feront de mes volumes réellement, et sans grand mérite de ma part, un complément très précieux aux annales du règne de George III.

« Je ne puis maintenant aborder la presse avant la nouvelle année, ni publier avant le milieu de 1861. Il serait déraisonnable de se hâter pour un ouvrage qui ne peut être devancé par aucun autre écrivain ; je ne l’ai pas non plus encore annoncé. Longman le publiera probablement. Un ou deux de mes amis seulement ont connaissance de mes matériaux. »


La publication tarda plus que ne le prévoyait l’auteur, et le quart au plus était terminé lorsque la mort l’a interrompu. Son plan était, non de se borner à un ouvrage de controverse, mais de donner toute une vie de Francis, de lui refaire ses mémoires en mêlant les pièces originales au récit ; puis, de cet exposé de faits, il aurait