Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 77.djvu/400

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

si on entend la placer sur la même ligne que l’unité des poids et mesures. Rien de moins exact qu’une pareille assimilation. M. Goschen dit avec pleine raison qu’en « supposant même un système identique de monnaie chez toutes les nations, les créances sur les pays étrangers seraient, suivant les circonstances, négociées à des prix différens ; on les céderait tantôt à prime et tantôt à perte, selon les demandes et selon les offres. » Il ne s’agit pas ici d’une simple mutation de monnaie, il s’agit d’une vendition de droits dont le prix varierait quand même les monnaies seraient identiques. Ce qui décide des conditions de l’achat, c’est la somme des engagemens respectifs des deux pays. Du moment que cette somme l’emporte d’un côté ou de l’autre, les effets les moins nombreux sont plus recherchés ; ceux qui désirent les acquérir se trouvent placés dans l’alternative de les payer plus cher ou de subir les charges et les risques de l’envoi du numéraire destiné à solder la créance. Il en résulte que, moins il y aura d’offre, plus il y aura de demande d’effets étrangers sur une place déterminée, plus aussi le prix relatif de ces effets haussera au-dessus du pair. La prime payée rencontre néanmoins une limite dans les frais et les charges de l’expédition du numéraire ; si elle dépassait cette quotité, le débiteur préférerait choisir l’autre voie pour s’acquitter. Dès que l’opération du change ne conduit à aucune économie et ne rend par conséquent aucun service réel, on s’en passe ; elle ne s’accomplit qu’en raison des facilités et des avantages qu’elle procure.

L’élément fondamental du prix du change se rencontre dans la somme relative des engagemens réciproques. Sans doute d’autres influences s’exercent pour modifier cette expression élémentaire du contrat ; il faut en tenir compte, mais sans perdre de vue le point de départ. Le terme du paiement, le taux de l’escompte perçu dans le lieu où le paiement doit se faire, la monnaie avec laquelle il est effectué, la confiance qu’on a dans la solvabilité de l’acceptant, modifient le résultat et affectent le prix du change ; mais tout demeure subordonné à l’équilibre des engagemens. Comment se forment ces engagemens internationaux représentés par les lettres de change qui leur donnent un corps ? Les effets délivrés sont-ils à vue ou à terme ? Quel est le crédit dont jouit le pays sur lequel ils sont tirés, et quelle est la solidité des débiteurs ? En quelle monnaie seront-ils payés ? Comment le taux de l’escompté pourra-t-il agir pour accélérer ou pour faire différer l’époque du remboursement, et par conséquent pour déterminer ou pour arrêter l’exportation du métal précieux ? Voilà des questions qu’il faudra successivement aborder ; disons d’abord en quoi peuvent consister les engagemens internationaux et comment la question du change se distingue de la