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de l’absence d’entreprises profitables ou de la stagnation des affaires que de l’abondance des ressources disponibles. Quant au mouvement du taux de l’escompte, il subit d’une manière bien plus énergique l’influence des circonstances transitoires : la redevance perçue peut se réduire de beaucoup sans autre cause que l’absence de la confiance dans l’avenir et la paralysie des entreprises ; elle peut aussi grossir très rapidement sous les impressions variables du marché monétaire. Dans ce dernier cas, la situation inverse se produit d’une façon complète. Si on est rassuré sur l’avenir, mais exposé à un embarras transitoire du marché, on préfère placer son avoir dans des valeurs solides, dont le prix se trouve momentanément déprécié, plutôt que de recueillir le bénéfice d’un escompte élevé, mais qui ne porte que sur une période courte. Alors le taux de l’escompte peut s’élever beaucoup au-dessus du taux de l’intérêt. Nous ne nous occupons encore que de cette situation respective des deux modes d’emploi des fonds disponibles ; nous aurons à parler plus tard de l’influence qu’exerce le taux élevé de l’escompte sur les mouvemens du marché monétaire.

Une comparaison vulgaire permettra de bien saisir la distinction que nous avons essayé de tracer. Le placement normal des capitaux engagés pour de longues périodes de temps peut être assimilé à la location des appartemens dans les villes par baux de trois, six et neuf ans ; l’emploi des fonds à l’escompte serait comme la location transitoire des appartemens meublés. Il est des saisons, aussi bien dans les grandes villes que dans les localités qui réunissent les étrangers, soit pendant le séjour des eaux minérales, soit pendant la villégiature, où le loyer d’un appartement meublé s’élève dans une progression rapide ; il en est d’autres où il descend au-dessous de la fraction correspondante du bail servi au propriétaire par le principal locataire, qui abandonne par-dessus le marché l’usage des meubles. Les choses se passent exactement de même sur le marché de l’escompte. Des variations nombreuses peuvent l’atteindre, alors que le marché de l’intérêt ne sera que faiblement affecté par les circonstances.

Le mouvement rapide du capital, sous la forme de numéraire ou de métaux précieux, permet, à mesure que les variations de l’escompte se produisent avec des écarts plus considérables, de rétablir l’équilibre par des envois de fonds à l’étranger ou par l’achat des titres de créance. En considérant la situation sous un autre aspect, cette fluctuation de l’escompte amène forcément le déplacement du capital ; elle peut agir sur le montant total des engagemens ou faire ajourner l’époque du remboursement demandé ; elle doit aussi provoquer le déplacement du numéraire lorsque la demande accrue de