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Les livres hébreux trouvant leur explication historique dans ceux de l’Asie, on est conduit en face de ces derniers, et c’est à eux qu’il faut demander la lumière. Anquetil-Duperron et Eugène Burnouf en France, MM. Spiegel en Allemagne et Haug dans la partie de l’Inde où habitent les pârsis, sont ceux dont les écrits ont le plus contribué à la connaissance de l’Avesta. H. Wilson, Langlois, Roth, MM. Max Müller, J. Muir, Weber, Benfey, Aufrecht et un grand nombre d’autres orientalistes nous ont fait connaître la littérature des Védas. Il ressort des œuvres variées de ces savans que le livre des Perses, malgré la haute antiquité de quelques-unes de ses parties, répond par ses doctrines à un âge postérieur à celui des hymnes indiens : il offre en effet une anion déjà étroite entre la théorie religieuse et les élémens sociaux et politiques de la civilisation iranienne; dans le Véda au contraire, cette union n’existe pas, ou n’en est qu’à ses premiers commencemens; les castes n’y sont même pas encore séparées, si ce n’est dans deux ou trois hymnes plus récens que les autres. De plus la théorie métaphysique n’y est pas achevée, elle s’y montre en voie de formation; le polythéisme, qui a précédé la grande doctrine panthéistique des brahmanes, y règne presque partout; celle-ci ne s’y laisse apercevoir que dans des chants composés par des hommes d’un génie manifestement supérieur aux autres, et ces hommes faisaient eux-mêmes partie de certains collèges de prêtres où l’on discutait ces questions. Dans l’Avesta, la doctrine a ses formules arrêtées et se rattache au nom d’un initiateur personnel, Zoroastre. Aussi quant au fond répond-elle à l’âge du brahmanisme, avec lequel elle soutient une lutte inconnue aux chantres du Véda. C’est donc en dernière analyse à celui-ci qu’il faut remonter, si l’on veut comprendre la nature de la religion primitive et avoir des données exactes sur son origine et sur sa formation. Or les études védiques, commencées seulement en 1833 par le spécimen des hymnes que publia Rosen, sont aujourd’hui assez avancées pour que ce triple problème puisse être considéré comme résolu.


I.

La naissance de la religion n’est plus un mystère. C’est un phénomène de psychologie générale qui ne suppose en lui-même aucun miracle, c’est-à-dire aucune intervention locale et extraordinaire d’une puissance supérieure à l’homme. Ce que certaines religions, et parmi elles la doctrine de Zoroastre et même celle des brahmanes, appellent révélation ne peut être entendu que dans le sens qui paraît avoir été adopté par l’auteur du quatrième Évangile :