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voies parallèles, la religion et la science, et que toutes les religions se réduisent à une seule, dont les élémens peuvent être déterminés et l’origine reconnue. Proclus manquait peut-être des documens qui depuis un demi-siècle se sont accumulés entre nos mains, et d’une autre part la science avait fourni une carrière moins vaste qu’elle ne l’a fait de nos jours. C’est donc nous qui les premiers pouvons aborder le problème avec des procédés scientifiques et des moyens suffisans d’investigation.

Or de toutes les études accomplies dans ces dernières années il ressort invariablement que les formules fondamentales de la religion reposent sur l’unité absolue de l’être, l’identité de la substance, l’universalité du principe de la vie et l’impersonnalité de la raison. Il n’est pas nécessaire de descendre jusqu’aux temps du brahmanisme et du mazdéisme persan pour trouver ces doctrines énoncées en termes formels dans les religions aryennes. Les hymnes indiens les renferment déjà, citons par exemple ces versets d’un hymne adressé à l’auteur de toutes choses, Viçwakarman :


« Le père de cet univers qui étonne nos yeux a dans sa pensée enfanté les ondes, et ensuite le ciel et la terre... Il s’élève avec splendeur, prêtant à tout sa beauté... En lui, sept pontifes ne font qu’un seul être supérieur; en son honneur, ils présentent avec allégresse l’offrande et la prière. Celui qui est notre père, qui a engendré et qui contient tous les êtres, connaît chaque monde. Unique, il fait les autres dieux; tout ce qui est le reconnaît pour maître... Les eaux ont porté dans leur sein celui qui donne la lumière à tous les êtres divins. Sur l’ombilic de l’incréé reposait un germe dans lequel se trouvaient tous les mondes. Vous connaissez celui qui a fait toutes ces choses; c’est le même qui vit au dedans de vous. »


Toute la genèse des êtres vivans ou inanimés et celle du saint sacrifice sont exposées dans un hymne adressé à Pouroucha, qui est le principe masculin suprême. Partout Agni, le feu, est présenté comme la vie universelle, la cause motrice, la source de l’intelligence, et en même temps comme l’agent de l’œuvre sainte et le mystique sacrificateur. Dans le long morceau attribué à Dirghatamas, et qui dans l’Inde porte le nom de « grand hymne, » le poète, après avoir indiqué les voies mystérieuses que suit le principe igné qui brille dans le soleil et sur l’autel, ajoute :


« L’esprit divin qui circule au ciel, on l’appelle Indra, Mitra, Varouna, Agni; les sages donnent à l’être unique plus d’un nom. »


Ailleurs il dit :


« L’homme agit, et sans le savoir n’agit que par lui; sans le voir, il