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dire parfaitement symétrique par rapport à l’axe visuel, comme une lentille; mais non, les courbures changent un peu dans toutes les directions, il semble que tout l’appareil ait subi une légère torsion. Il en résulte ce que l’on nomme l’astigmatisme de l’œil, qui consiste en ce que nous ne pouvons voir à même distance une ligne verticale aussi distinctement qu’une ligne horizontale. Ce phénomène, depuis peu découvert, a récemment attiré toute l’attention des oculistes, car, lorsqu’il s’exagère beaucoup, il constitue une véritable maladie de l’œil.

Mal centré, dyssymétrique, aveugle par places, l’œil rachète-t-il au moins en partie ces défauts par une transparence parfaite? Non, la cornée transparente et le cristallin de l’œil ne sont point absolument limpides : ils paraissent un peu troubles quand on les examine dans une lumière très intense; le phénomène est surtout marqué dans la lumière bleue et violette, qui les rend tout à fait fluorescens. Cette propriété est due à des traces d’une substance analogue à la quinine, corps qui jouit au plus haut degré de la fluorescence, c’est-à-dire de la propriété d’émettre une faible lumière propre sous l’excitation d’une lumière bleue ou violette.

La substance même du cristallin est semée de petits corpuscules opaques, dits entoptiques. Le corps vitreux qui baigne l’intérieur de l’œil est sans cesse traversé de particules flottantes, de petites fibres, de noyaux, de membranes, qui, en projetant une ombre sur la rétine, nous font apercevoir ce qu’on nomme les mouches volantes. L’œil en bonne santé ne fait guère attention à ces petites broderies mouvantes qui sans cesse traversent le champ de la vision, à moins qu’il ne contemple un fonds uni et très fortement éclairé; mais la moindre exaltation de la sensibilité y rend plus attentif : il arrive ainsi très souvent qu’au début d’une maladie on se préoccupe outre mesure de ces mouches qu’en temps ordinaire on n’apercevait pas du tout. Enfin le cristallin n’est point d’une composition absolument homogène ; il a une façon de structure cristalline à six branches. De là vient que nous apercevons toujours les étoiles avec des rayons, phénomène de scintillation dont on a vainement cherché l’explication jusqu’à ce qu’on l’ait trouvée dans la composition même de notre organe visuel. C’est pour le même motif que le croissant de la lune, quand il est encore mince, apparaît double ou triple à beaucoup de personnes.

Nous avons dit que la lumière, avant d’arriver à la couche sensible des cônes, traversait une première couche rétinienne; cet écran insensible oppose aussi de légers obstacles à la vision, car il est tapissé de vaisseaux sanguins peu transparens dont l’ombre se projette sur le fond de la rétine. On peut apercevoir ces ombres quand