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nombre de publicistes américains[1], l’union des états sud-américains entre eux par une alliance offensive et défensive; l’Amérique du sud eût constitué une vaste confédération dont l’organisation n’eût pas été sans offrir certaines analogies avec l’ancienne confédération germanique. Un assez grand nombre des états convoqués finit par se rallier à cette idée et se fit représenter à Lima. Cette assemblée préliminaire n’avait aucun caractère officiel. Elle ne pouvait prétendre représenter auprès des puissances étrangères une confédération qui n’existait pas. Elle n’en mit pas moins d’empressement à se considérer comme une sorte de diète déjà chargée de régler souverainement la politique des états américains. Elle interdit la guerre : le président Pezet et le congrès péruvien se laissèrent aisément persuader. Elle essaya ensuite de traiter de la paix avec l’amiral Pareja; celui-ci ne l’écouta pas. Il avait formulé ses propositions, et n’entendait plus les modifier. Un plénipotentiaire péruvien se présenta pour obtenir des adoucissemens. Pour toute réponse, l’amiral espagnol s’embossa devant le Callao et menaça la place d’un bombardement. Deux jours après, le 27 janvier 1865, les conditions imposées par l’Espagne étaient acceptées par le gouvernement péruvien, éperdu, ne songeant plus même à la possibilité de la résistance. Indemnités aux particuliers, frais de guerre, tout fut accordé. Le peuple, il est vrai, s’indigna de ces concessions. Des scènes de violence eurent lieu au Callao ; plus tard une insurrection, née dans les provinces du sud et qui gagna tout le pays, finit par renverser le président. Quant au congrès, s’il ne ratifia pas le traité, il ne se sentit pas non plus d’humeur assez hardie pour le décliner et pour prendre sur lui la responsabilité de soutenir la guerre. Il éluda la difficulté en prononçant brusquement la clôture de la session. Le président Pezet passa outre et signa.

Ainsi, durant cette première période d’hostilités, les choses s’étaient passées de la même façon que dans toutes les occasions antérieures où une puissance européenne s’était trouvée en conflit avec un des états hispano-américains. L’Espagne avait posé ses griefs; le Pérou avait discuté, protesté, cherché à gagner du temps, n’avait trouvé au dehors d’autre appui que les témoignages stériles d’une sympathie qui ne s’affirmait pas par des actes, et il avait fini par céder. Néanmoins la population péruvienne semblait déjà s’essayer à des idées de résistance. Ces dispositions se manifestèrent avec une bien autre énergie lorsque l’Espagne, entamant une nouvelle série d’hostilités, vint attaquer le Chili. Partagées cette fois

  1. Voyez la Revue du 15 novembre 1865.