Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 77.djvu/781

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prenait une tournure plus inquiétante. Le 31 mars, le cabinet de Vienne avait nié formellement toute intention hostile. Il n’en parut pas moins à Berlin le 2 avril une nouvelle note dénonçant les préparatifs de l’Autriche, qui, au dire de la presse, devenaient toujours plus formidables. Le 7, M. de Bismarck écrivit à M. de Werther que les éclaircissemens donnés par l’Autriche étaient insuffisans, que depuis le 13 mars elle concentrait des forces considérables sur la frontière prussienne, qu’on ne signalait aucun danger justifiant le prétendu caractère défensif de ces armemens, et que rien n’était plus éloigné des intentions du roi de Prusse qu’une guerre offensive contre l’Autriche. M. de Mensdorff répondit le 7 avril. « Il n’y a point eu, disait-il, de concentrations importantes de troupes, ni de prises de positions, ni de rappels de soldats en congé sur une large échelle. Les dislocations de troupes qui ont eu lieu en réalité, on les a fait connaître à M. de Werther. Il sait ainsi qu’il n’a été pris en Autriche aucune des mesures qui, d’après l’organisation de nos armées, précèdent l’ouverture d’une grande guerre. » A cela, M. de Bismarck répondit le 15 avril que le gouvernement autrichien, ayant commencé les mouvemens de troupes, devait rétablir le statu quo. M. de Mensdorff répliqua le 18 par une proposition de désarmement simultané, ajoutant qu’après les assurances mutuellement données toute discussion sur la priorité des armemens était désormais superflue. M. de Bismarck écrivit le 21 à M. de Werther qu’il adhérait à la combinaison proposée, et que la réduction des effectifs, augmentés depuis le 27 mars, aurait lieu dans les mêmes délais que la diminution correspondante des préparatifs autrichiens. Pour ces délais, on attendrait des communications plus précises du gouvernement impérial, afin de le suivre pas à pas dans le désarmement.

A la suite de ces explications, on put croire un instant à un rapprochement. C’était le moment où la diète venait de renvoyer à la commission des 9 la motion prussienne. Les ministres des états secondaires, qui s’étaient réunis le même jour en toute hâte à Augsbourg pour régler leur conduite commune, se séparèrent avec quelque espérance d’écarter encore la guerre; mais les choses ne tardèrent point à s’assombrir de nouveau. A Berlin, on prenait dès le 24 des mesures plus ostensibles, et les nouvelles qui arrivaient d’Italie ne faisaient que compliquer davantage la situation. On put voir alors dans quelle impasse M. de Bismarck avait attiré le cabinet de Vienne. L’Italie armait ouvertement. L’Autriche ne pouvait la laisser faire sans se mettre en défense: si elle se décidait à éloigner ses troupes de la Bohême, elle devait en même temps renforcer celles de la Vénétie. Ce n’était point le compte du ministre prussien, et le 26 avril la Gazette de l’Allemagne du Nord déclara que la Prusse