Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 78.djvu/323

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
UN
PAQUET DE LETTRES


L’ABBE LEROUX AU COMTE DE X...


Cher monsieur le comte,

L’excellent abbé Derval m’a transmis vos affectueux complimens, et je viens vous en exprimer toute ma gratitude. Monseigneur de son côté vous rend mille grâces pour l’intérêt que vous prenez à ses souffrances physiques. Un habile praticien de Paris, le docteur Vincent, a déjà procuré de grands soulagemens à notre vénéré pasteur, et tout me fait espérer que, Dieu aidant, les dangers que nous redoutons seront à jamais conjurés.

Vous voulez bien, monsieur le comte, m’inviter à venir au printemps passer quelques jours à Sainte-Croix; je vous en suis fort reconnaissant. Je n’ai point oublié la grâce charmante avec laquelle vous et Mme la comtesse voulûtes bien m’y accueillir lors de la première communion du jeune vicomte, et cela serait pour moi une joie grande que de revoir ces ombrages touffus, ces bosquets embaumés, où nous eûmes, s’il vous en souvient, de si longues et de si douces conversations sur l’éducation religieuse du cher enfant.

La confiance dont vous me donnâtes alors le précieux témoignage suffirait à me rendre chère cette campagne de Sainte-Croix, alors même que les souvenirs personnels de mon humble enfance ne seraient pas là pour m’attirer vers ce beau pays.

C’est dans cette maisonnette entourée de son petit verger, qui touche à vos terres et confine au bourg, que se passa mon enfance, c’est là que plus tard je résolus de me donner à Dieu, là que mon vieux père, après une vie de labeur, rendit son âme... Chers souvenirs, touchantes impressions, que votre invitation ravive en mon cœur !