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fois démonétisé. C’étaient là des questions de doctrine un peu en dehors de leur compétence. Ils pouvaient craindre d’engager leur responsabilité en y répondant, et il était à supposer que, s’ils y répondaient, ce serait pour se montrer favorables au système existant, comme font toujours ceux qui n’ont pas des opinions arrêtées, qui ne veulent pas se compromettre, et pour lesquels le maintien du statu quo est toujours la solution préférable. Eh bien! les autorités consultées n’ont pas craint de s’engager, et voici les réponses qu’elles ont faites sur les questions même qui pouvaient le plus les embarrasser.

Sur 91 receveurs-généraux, 69 ont demandé de voir l’or devenir l’étalon unique de la monnaie; sur ce nombre, 55 voulaient que la pièce de 5 francs fût réduite au titre de 835 millièmes de fin, 11 qu’elle fût supprimée tout à fait, 9 opinaient pour que, tout en cessant d’être une monnaie légale, elle pût encore être frappée sur la demande et selon les besoins du commerce, soit pour le trafic intérieur, soit pour être exportée en Orient. Parmi les 22 receveurs qui se prononcent moins catégoriquement en faveur de l’étalon d’or, 13 ont fait des réponses ambiguës, 9 seulement expriment nettement le vœu que les conditions actuelles de la circulation soient maintenues. Quant aux chambres de commerce, 68 ont donné leur avis; 10 opinent pour la suppression pure et simple de la pièce de 5 francs en argent, 10 pour que l’on conserve cette monnaie sans lui donner cours obligatoire, 25 se prononcent pour la réduction du titre à 835 millièmes de fin : en tout, 45 se montrent donc favorables à l’adoption de l’étalon d’or. 2 réponses sont évasives, 8 douteuses, 13 favorables au double étalon.

Ces réponses avaient incontestablement une grande importance; jointes à la déclaration de la conférence internationale et au changement de valeur de l’argent, elles infirmaient complètement les décisions de la première commission. M. le ministre des finances l’a compris, et il vient, il y a quelques mois, de nommer une nouvelle commission, composée cette fois de 20 membres, qui doit, dit-on, faire connaître son opinion assez prochainement. Sera-t-elle ou non favorable au maintien du double étalon? Nous l’ignorons; mais comme la question est d’intérêt général, et qu’il appartient à chacun de l’examiner, nous croyons utile de présenter ici quelques observations préalables.


II.

D’abord il y a un point qu’il est nécessaire d’éclaircir avant d’étudier le fond du débat. On a dit que la monnaie d’argent était le