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vérité si simple; on lui offre une source de recettes, et il n’en veut pas; il aime mieux augmenter à l’intérieur des impôts lourds et impopulaires.

La distinction entre le point de vue fiscal et le point de vue protecteur en matière des douanes est ancienne et élémentaire; elle se trouve dans tous les livres d’économie politique, et les économistes les plus connus pour leur attachement à la liberté commerciale l’ont professée. Elle n’a donc pas été inventée pour le besoin de la cause. Dans son entraînement, le gouvernement l’a méconnue, il a réduit outre mesure les droits de douane. Les hommes les plus compétens affirment qu’on s’est privé ainsi sans nécessité de 100 millions de recettes annuelles qui auraient permis d’alléger d’autres taxes. Il faudra revenir tôt ou tard sur ce radicalisme inconsidéré. Les ministres ont poussé l’engouement jusqu’à défendre l’usage devenu inutile des introductions en franchise de droits au moyen de ce qu’on appelle les acquits à caution. Cet usage était justifié sous l’empire des droits protecteurs et des prohibitions, on échappait par là aux rigueurs de la loi; mais avec des droits modérés et purement fiscaux, c’est un abus. Nul ne doit avoir le droit de se soustraire à un impôt. Le gouvernement a été forcé de reculer cette année en ce qui concerne les acquits à caution pour les fers; il a maintenu le principe, mais en restreignant l’application. Il devra en faire autant un jour ou l’autre pour les céréales. Sur ce point du moins, il y a eu dans l’enquête une grande majorité. M. Monny de Mornay ne le nie pas. Les commissions départementales elles-mêmes se sont prononcées en grand nombre.

Le chapitre du rapport qui traite de la législation civile et générale fait double emploi avec la plupart des autres. En règle absolue, il s’agit de simplifier la législation civile et de débarrasser la propriété immobilière de ces précautions excessives qui l’étouffent en voulant la protéger. Ce n’est pas une petite affaire. Les jurisconsultes résistent et résisteront. Les difficultés qu’a rencontrées le projet de loi sur les ventes judiciaires d’immeubles montrent ce qu’il faut attendre. Les partisans fanatiques du code civil vont jusqu’à défendre la législation sur le cheptel, bien qu’elle choque le bon sens dans quelques-unes de ses dispositions, notamment dans celle qui intéresse le cheptelier à la destruction totale des animaux confiés à ses soins. On paraît un peu plus d’accord pour l’extension de la compétence des juges de paix. Par sa résidence au chef-lieu de canton, qui le met fréquemment en contact avec les habitans de la campagne, le juge de paix est pour eux le magistrat par excellence. On voudrait qu’il fût chargé des petites licitations, des ventes d’immeubles ne dépassant pas un chiffre déterminé et particulière-