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més à l’intérieur, les propriétaires de vignobles auront toujours intérêt à y employer les alcools qu’ils fabriquent eux-mêmes. Si l’on a eu besoin un moment d’avoir recours à l’alcool de betterave, c’est que l’oïdium avait réduit de moitié la récolte du vin. Il est d’ailleurs constant que l’usage du vinage diminue. Les propriétaires font leurs vins avec plus de soin, et l’addition d’alcool poussée trop loin peut rendre le vin mauvais et insalubre.

Les droits sur les vins prêtent au contraire aux critiques les plus fondées. Ces droits sont compliqués, mal assis, d’une perception gênante et vexatoire, et ils nuisent au débit d’une boisson saine et fortifiante. Les droits se divisent en trois, le droit de circulation, le droit d’entrée dans les villes et le droit de détail. Le plus productif et le meilleur des trois est le droit de détail, qui se perçoit surtout dans les cabarets. S’il était possible d’abaisser considérablement le droit de circulation et le droit d’entrée, le trésor y perdrait d’abord; mais le progrès de la consommation réparerait promptement cette perte. On s’est plaint que les vins communs fussent soumis aux mêmes droits que les vins fins, ce qui est injuste assurément; mais comment faire la différence? Une autre proposition est venue du département de Saône-et-Loire, un des plus intéressés au commerce des vins; elle consisterait à remplacer toutes les formalités de la circulation par un timbre mobile apposé au lieu d’expédition sur les tonneaux, et qui indiquerait, avec le nom de l’expéditeur, le nom et l’adresse du destinataire. Ce serait une simplification heureuse, à l’imitation de ce qui se passe pour l’affranchissement des lettres.

M. Monny de Mornay défend les octrois. Il est en effet difficile de les remplacer, surtout à Paris, où cette source de recette rapporte aujourd’hui 100 millions. La question n’est pourtant pas insoluble, et quand on voudra l’aborder avec la ferme intention de la résoudre, on y parviendra sans trop de peine. Comment font toutes les villes de l’Europe qui n’ont pas d’octroi? La France sera bientôt le seul pays qui conservera ce déplorable impôt; on l’abolit partout. En France au contraire, il est constamment en progrès. On apprend tous les jours que de nouvelles communes demandent à se donner un octroi ou à élever leurs tarifs. D’autres villes étendent arbitrairement le périmètre de l’octroi à une grande distance de leurs limites pour englober des populations rurales. Que toutes les communes en fassent autant, et ces cercles finiront par se toucher. La France alors présentera l’agréable spectacle d’un pays où l’on ne pourra faire un pas sans rencontrer un bureau de perception. Évidemment on a eu tort d’abolir en 1789 les douanes intérieures, puisqu’on les centuple aujourd’hui. On donne pour raison que les communes ont