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enfant que de donner à son esprit une trempe virile et vigoureuse, et que l’étude des langues mortes est le meilleur moyen de développer l’intelligence. De l’avis de leurs docteurs, l’éducation et l’instruction par excellence étaient le fruit des études grecques et latines. La vie commune des écoles, le culte de l’antiquité classique, le goût des jeux athlétiques, telles étaient les trois conditions nécessaires et suffisantes pour former un gentleman accompli, un bon citoyen, un homme utile. Dans un moment critique, au plus fort de la guerre de Crimée, ils furent contraints de reconnaître que leurs officiers, si braves sur le champ de bataille, péchaient par défaut d’instruction technique. L’armée anglaise possède trois écoles militaires, — l’académie royale de Woolwich, qui prépare au génie et à l’artillerie, le collège de Sandhurst pour l’infanterie et la cavalerie, et une école d’état-major dont le siège est aussi à Sandhurst. Avant 1855, on était admis à Woolwich par faveur, et l’examen, peu sérieux au surplus, que l’on avait à subir n’intervenait qu’après l’admission; depuis quelques années, on n’entre plus dans ces trois écoles que par voie de concours. Classés par ordre de mérite à l’entrée, les élèves le sont encore au moment de la sortie. Les premiers inscrits sur la liste obtiennent à titre gratuit une commission dans l’armée; les derniers n’ont que le droit d’en acheter une. Ainsi les jeunes officiers qui acquièrent leur grade à prix d’argent sont dès le début rangés moins haut que leurs camarades qui l’ont obtenu par concours, bon moyen de discréditer une ancienne et déplorable coutume que l’on n’ose supprimer d’un seul coup. D’ailleurs l’examen requis de tous ceux qui prétendent à une lieutenance, soit qu’ils la gagnent au concours, soit qu’ils l’achètent, n’a rien d’effrayant; le programme est assez élastique pour ne rebuter aucun jeune homme d’une intelligence moyenne. Les élémens des mathématiques sont obligatoires pour tous; comme complément, les uns demandent à être interrogés sur les langues anciennes, d’autres présentent les langues vivantes, l’histoire, les sciences naturelles, voire le sanscrit et l’hindoustani. Le candidat doit prouver qu’il possède un esprit cultivé plutôt que des connaissances spéciales.

Le gouvernement a de même placé un concours ou tout au moins un examen à l’entrée de toutes les carrières dont il dispose, les douanes, les postes, les ministères, le service civil de l’Inde; les épreuves d’entrée dans ces diverses administrations sont réglées à peu près comme celles de l’admission à Woolwich et à Sandhurst. Rien ne nous semble plus naturel qu’un tel mode de recrutement ; en Angleterre, c’est une innovation de date récente. Les universités elles-mêmes, malgré leur attachement invétéré à l’enseigne-