Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 80.djvu/122

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prendre soin d’assurer son avenir. Devenu supérieur au milieu dans lequel il est né, le jeune campagnard ne voudra plus conduire la charrue. Ce n’est pas les Géorgiques à la main, nous dit-on, qu’on laboure la terre. Ces craintes seraient tout au plus de mise en France, où le paysan ambitieux émigré de son village à la ville la plus voisine. Dans les îles britanniques, l’homme qui ne se croit pas à sa place va au Canada, aux Indes ou en Australie. Il y fait fortune, s’il est en réalité instruit et intelligent; puis sur le retour de l’âge il revient au pays natal. Il sert d’exemple et de stimulant à la jeune génération qui le suit.

On le voit, il n’y a pas en Écosse une ligne de démarcation bien tranchée entre l’instruction primaire et l’enseignement secondaire. Cependant les principales villes possèdent des établissemens scolaires qui, sous le nom d’écoles urbaines (burgh schools) ou d’académies, donnent aux langues anciennes plus de développement que les écoles paroissiales. Par malheur, ces écoles urbaines, qui dépendent en général de l’administration locale, ont souvent dépéri par la faute des municipalités. Il y a trente ans, avant qu’une loi n’y eût remédié, la gestion des communes écossaises était si défectueuse que plusieurs municipalités furent déclarées en faillite. Ce n’est pas au reste que les écoles secondaires aient été moins bien pourvues que celles des campagnes par de généreux bienfaiteurs. Un ecclésiastique, le Dr Andrew Bell, qui avait amassé une grande fortune à Madras, laissa en 1830 3 millions de francs pour la création assez bizarre d’écoles secondaires basées sur le principe de l’enseignement mutuel. Le capitaine Mackintosh, de la marine marchande de l’Inde, légua en 1809 un capital de 10,000 livres sterling à l’académie royale d’Inverness pour l’éducation gratuite des enfans de toutes les familles portant le nom générique de Mackintosh. Cette générosité avait été mal calculée. Il ne se présente jamais qu’un petit nombre d’ayant-droit, si bien que les fidéi-commissaires du legs sont réduits à joindre chaque année une part du revenu au capital.

Ce n’est pas dans les écoles fondées, comme celles du Dr Bell, sur un principe exclusif, qu’il convient d’examiner ce qu’est l’enseignement secondaire en Écosse; ce n’est pas non plus dans les petits établissemens que des municipalités obérées soutiennent avec peine, moins encore dans les innombrables écoles privées, parfois excellentes, mais souvent peu honorables, qui pullulent au-delà de même qu’en-deçà de la Tweed. Il vaut mieux s’adresser aux grandes écoles de villes telles qu’Edimbourg, Glasgow ou Aberdeen. Les établissemens scolaires de ces dernières sont aussi des institutions purement municipales; mais ils appartiennent à des villes opulentes.