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elle s’empare d’un homme, est si exclusive qu’elle lui fait oublier toute autre considération ; c’est elle qui dictait autrefois à nos seigneurs et à nos monarques ces supplices variés qu’ils faisaient subir aux audacieux qui allaient chasser sur leurs terres. De nos jours, sans aller jusque-là, elle brouille parfois les meilleurs amis, et fait perdre, même aux plus honnêtes gens, le respect dû à la propriété d’autrui. Elle a pris d’ailleurs, dans ces dernières années, un tel développement qu’il n’est pas de jour qui ne voie paraître quelque nouvel ouvrage ayant la chasse pour objet. Il se forme ainsi peu à peu une véritable bibliothèque du sportsman.

Tous ces ouvrages n’ont pas l’importance du Nouveau traité des chasses publié par MM. de Lâge, de La Rue et de Cherville ; mais il en est néanmoins parmi les plus récens un certain nombre qui méritent d’être mentionnés. Telles sont notamment les deux publications intitulées Conseils aux chasseurs, par Ch. Bemelmans, et Soixante années de chasse, par J.-A. Clamart, dont les auteurs sont l’un et l’autre d’anciens gardes-chasse. Ces petits livres, assez semblables quant au fond et quant à la forme, renferment tous deux des renseignemens utiles sur les diverses espèces de gibier qu’on trouve en France, et des conseils pratiques sur les moyens de les chasser, de les perpétuer et de combattre leurs ennemis, braconniers ou animaux carnassiers.

Malheureusement ces auteurs, exclusivement préoccupés de questions de métier, ne s’aperçoivent pas que c’est la loi elle-même qui est le plus grand obstacle à la conservation du gibier, et qu’il y aurait sous ce rapport un grand avantage à la supprimer et à rentrer dans le droit commun. Si les propriétaires étaient maîtres chez eux, s’ils pouvaient chasser et vendre leur gibier à leur gré, si les braconniers étaient poursuivis comme des voleurs, en un mot, si l’on s’en rapportait à l’intérêt personnel du soin de conserver et de multiplier le gibier, on verrait bientôt celui-ci se montrer en abondance. La loi en effet est impuissante à en empêcher la destruction, et si certains propriétaires trouvent moyen d’en avoir, ce n’est point à la loi qu’il faut faire honneur de ce succès. Il n’y a de giboyeuses que les chasses soignées, et l’on n’a intérêt à les soigner que lorsqu’on est libre d’en disposer comme on l’entend. Cette idée finira bien par faire son chemin.

Un ouvrage plus spécial que ceux qui précèdent est le Chasseur infaillible, par Marksman, traduit de l’anglais par M. Chérubin Kerdael. Il contient, avec des conseils bien raisonnes sur le choix et la charge du fusil, l’exposé des principes qui doivent régir le tir, suivant les diverses espèces de gibier, et, en s’étudiant à les mettre en pratique, on arrive assez rapidement à devenir un tireur passable.


J. CLAVE


C. BULOZ.