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trait de trouver des débouchés nouveaux sur les marchés étrangers. Cet abaissement des prix, comment y arriver ? C’est là que gît la difficulté. Il est naturel de le demander d’abord à l’économie. On tâche de diminuer les frais généraux et la main-d’œuvre. On s’efforce de tirer un meilleur parti des matières premières. On perfectionne les moteurs et l’outillage. Ce travail intérieur constitue une évolution très intéressante. L’industrie y apprend à se débarrasser des traditions routinières, à modifier ses procédés avec intelligence. Il en résulte un abaissement de prix assez notable pour activer la consommation intérieure, pas assez toutefois en général pour ouvrir un large débouché extérieur.

Le fabricant s’aperçoit enfin des entraves qui pèsent sur lui. Il comprend que le bon marché des matières premières et des instrumens de travail pourrait seul le sauver ; il voit que le prix en est artificiellement élevé par le compromis même qui lui permettait de vendre avantageusement ses produits, et qui, à cause de la concurrence intérieure, est devenu impuissant à lui continuer cet avantage. On assiste alors à la plus étrange compétition d’intérêts. Le maître de forges se plaint des droits qui enchérissent les houilles étrangères. Le constructeur de machines demande qu’on laisse entrer les cuivres, les fers, les fontes, les aciers. Le filateur demande la diminution des droits sur les machines. Le fabricant de calicot à son tour s’attaque au tarif des cotons filés, et l’imprimeur de toiles peintes à celui des toiles écrues. En un mot, par une inconséquence naturelle aux intérêts qui souffrent, chacun veut enlever aux autres le bénéfice de la protection, tout en le conservant pour lui. La chose est impossible, cela se comprend de reste. Tous sont rivés à la même chaîne, dont les anneaux sont solidaires. Il faut la conserver intacte ou la briser en entier. De cette solution radicale, personne au fond ne se soucie. Force est donc de chercher des remèdes moins énergiques. Il n’en est point pour abaisser les prix à l’intérieur ; maison en a essayé qui permettent d’ouvrir à l’industrie le marché extérieur.

C’est ainsi qu’a été établi d’abord l’acquit à caution, c’est-à-dire la faculté d’introduire en franchise certaines matières, à la condition de les réexporter après les avoir mises en œuvre dans un délai déterminé. L’acquit à caution n’a jamais été généralisé. Il est toujours resté à l’état de privilège pour certaines industries, ce qui est un grand vice, et il est une source d’abus constans. Ce moyen est aujourd’hui jugé : personne n’en veut plus, excepté ceux qui l’exploitent à leur profit. Vient ensuite la prime de sortie que la douane compte à l’industriel exportateur, et qui représente tout ou partie des droits qu’il est censé avoir payés sur les matières employées dans sa fabrication. La prime de sortie a les mêmes défauts que l’acquit à caution. Elle est décriée comme lui.