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9 dixièmes de fin, représentant une valeur de 3,093 fr. 30 cent., ce qui fait environ 1/5 pour 100, que l’on paie directement à l’entrepreneur chargé du monnayage pour le compte de l’état, ou plutôt qui est retenu d’avance sur la valeur du lingot. Maintenant il faut y ajouter la perte d’intérêt pendant le délai de fabrication. Ce délai était autrefois de huit jours : après huit jours, on recevait en monnaie d’or le montant exact du lingot qu’on avait apporté, sauf la retenue ; mais depuis la découverte des mines de la Californie et de l’Australie il a été impossible de s’en tenir à ces limites, la fabrication était devenue trop considérable. Une circulaire ministérielle du mois de décembre 1850 est venue décider que l’entrepreneur de la Monnaie délivrerait des bons de paiemens de façon à n’avoir jamais à en acquitter pour plus d’un million par jour, de sorte qu’aujourd’hui le délai pour recevoir en pièces neuves le montant des lingots est incertain et variable ; il dépend de la quantité d’or qui est à monnayer, il peut être très court, comme il peut être assez long. Nous le supposerons en moyenne d’un mois, et nous calculerons l’intérêt sur le pied de 4 pour 100 ; c’est beaucoup plus que celui qui règne dans le commerce et que la Banque fait payer depuis trois ans. Un mois d’intérêt à 4 pour 100 par an représente 33 centimes ou 1/3 pour 100 ; si on y ajoute le 1/5 pour 100 qui représente le droit, on arrive à 1/2 pour 100 environ ; 1/2 pour 100, tel est le maximum de ce qu’il en coûte en France, tout compris, pour faire fabriquer de la monnaie d’or. En Italie, en Belgique, dans les états qui ont adhéré à la convention de 1865, le droit doit être à peu près le même ; il est de 1/2 pour 100 aussi en Prusse. La Russie est le seul pays d’Europe qui, avec l’Angleterre, ne prélève rien ; mais aux États-Unis, dans l’Inde, dans l’Australie, le droit est de 1 pour 100, et avec le délai de fabrication il monte à 1 1/3 et même 1 1/2 pour 100.

La franchise du monnayage remonte en Angleterre au règne de Charles II, au commencement du XVIIe siècle. Elle avait d’abord été établie à titre provisoire ; elle fut rendue définitive en 1769. Adam Smith suppose que cette franchise fut accordée dans l’intérêt de la Banque d’Angleterre, qui avait besoin de remplir ses caisses, et qui trouvait commode de rejeter sur le trésor public les frais de fabrication. Une autre considération contribua encore à la maintenir ; on s’imaginait qu’elle favorise le commerce extérieur, et que plus la valeur intrinsèque de la monnaie est rapprochée de la valeur nominale, plus elle est en faveur auprès des étrangers, qui ne reçoivent en général la monnaie que pour sa valeur réelle. Quoi qu’il en soit, les Anglais tiennent beaucoup à cette absence chez eux de tout droit régalien ; il leur semble que la dignité de l’état y est