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les campagnes moins de jeunes villageois, et qu’il y mourra chez les nourrices plus de jeunes citadins. Cette remarque est surtout importante pour ce qui concerne la mortalité des enfans naturels dans la population rurale, mortalité qui s’élève à 43 pour 100 alors que celle des enfans légitimes n’y est que de 16 pour 100, et elle rend compte de cette différence si extraordinaire. En effet dans la population rurale pour 1 seul enfant naturel, il y a 21 enfans légitimes, tandis qu’à Paris pour 1 enfant naturel, c’est à peine s’il y a 3 enfans légitimes. Or si au chiffre des décès des enfans naturels nés au village l’on ajoute les décès nombreux des trop nombreux enfans naturels nés dans les grandes villes et envoyés en nourrice, et si l’on compare ce chiffre de décès ainsi augmenté à celui des naissances rurales, laissé sans changement, on arrivera pour les campagnes à une proportion de mortalité qui ne sera pas l’expression de la vérité[1]. C’est ce qu’on paraît avoir un peu trop oublié.

Les mêmes raisons expliquent la mortalité, si faible en apparence, des enfans à Paris, et elles doivent nous faire présumer que le maximum de la mortalité devra se rencontrer dans les départemens où s’exerce, surtout pour les enfans de la capitale, l’industrie nourricière. C’est en effet ce qui existe. La mortalité infantile, calculée de cette façon vicieuse, serait de 23 pour 100 dans Sein i-et-Oise et le Loiret, de 24 dans l’Oise, Seine-et-Marne et la Marne, de 25 dans l’Eure et dans l’Aube, de 26 dans l’Yonne et la Seine-Inférieure, de 29 dans Eure-et-Loir.

Si au lieu de comparer les décès aux naissances on utilise le recensement quinquennal pour comparer le nombre des décès au nombre des enfans de moins d’un an existant dans un département, quel que soit le lieu de leur naissance, l’on verra, d’après la statistique publiée par le ministère de l’agriculture et du commerce, que cette mortalité, de 11 pour 100 seulement dans la Creuse et les Basses-Pyrénées, de 13 pour 100 dans l’Indre, dépasse 24 pour 100 dans les treize départemens qui entourent Paris. Cette mortalité est pour Seine-et-Marne et la Haute-Marne de 24 pour 100, pour l’Eure, l’Aisne, la Côte-d’Or, l’Yonne, de 26, pour

  1. Naissances et décès des enfans légitimes et naturels de moins d’un an (déduction faite des mort-nés) en France (1858-1805, moyenne des huit années).
    Enfans légitimes Enfans naturels
    Naissances Population urbaine 225,240 29,712
    « Population rurale 650,659 29,846
    « Département de la Seine 44,655 15,995
    Décès Population urbaine 38,965 8,318
    « Population rurale 108,527 13,116
    « Département de la Seine 7,049 3,107