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témoignaient de l’activité du nouveau préfet de la Seine. L’ouverture des boulevards de Strasbourg et de Sébastopol dégageait les quartiers les plus obstrués. Avec la loi du 10 juin 1857, le boulevard de Sébastopol passa la Seine, et les améliorations de la rive droite se poursuivirent dans les quartiers de la rive gauche ; mais ce fut en 1858 que se révéla dans toute son ampleur le plan de la rénovation de Paris. Moyennant le concours de l’état, la ville se chargea d’exécuter en dix ans des travaux qui comprenaient la création de neuf boulevards, l’ouverture de dix rues ayant 20, 22 et 40 mètres de largeur, le raccordement d’un grand nombre d’autres rues aux précédentes et le percement de six nouvelles avenues.

Jusqu’alors, le préfet de la Seine avait sollicité le concours de l’état pour les grandes opérations de voirie ; il s’ensuivait que ces opérations elles-mêmes étaient appréciées et à quelques égards contrôlées par le corps législatif ; mais, sous prétexte que la ville allait poursuivre avec ses seules ressources une nouvelle série de travaux, le préfet, à partir de 1864, cinq ans même avant le délai fixé pour l’achèvement de l’œuvre inaugurée en 1860, donna tout à coup à une entreprise déjà si grande des proportions plus grandes encore, s’affranchit désormais de toute surveillance hiérarchique et ne connut plus de frein. La caisse des travaux de Paris, créée en novembre 1858, pour centraliser le mouvement de recettes et de dépenses propres à ces percemens, fournissait à la préfecture, par l’émission de bons spéciaux, une ressource importante, qui a varié de 100 à 150 millions ; mais cette émission était encore l’objet d’un vote annuel du corps législatif. Ce moyen de trésorerie ne suffisant plus à défrayer les dépenses des percemens nouveaux, le préfet inaugura le système des concessions amiables à des compagnies d’entrepreneurs qu’on solda par la remise de bons de délégation sur les revenus futurs de la ville. Prétendant que ce n’était là qu’un emploi des ressources ordinaires, un aménagement de l’avenir et nullement un emprunt, il put, cinq années de suite, échapper à tout contrôle et s’engager librement dans d’énormes dépenses.

D’après une locution prise du système d’exécution des chemins de fer, on a appelé premier, deuxième, troisième réseau, chacune des séries successives de ces grandes opérations de voirie. Le premier réseau comprenait les travaux qui avaient fait l’objet des lois antérieures à 1859, c’est-à-dire les halles, les boulevards Sébastopol, rive droite et rive gauche, la rue de Rivoli, le dégagement de la Cité. Le deuxième réseau fit l’objet de la loi de 1859 et du traité dit des 180 millions ; la ville s’obligeait à l’achever en dix ans. L’article 1er de cette loi mentionne la création des boulevards du Prince-Eugène, du Nord, du Château-d’Eau, de Malesherbes, de Beaujon, des trois avenues partant du pont de l’Alma,