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sentiment qu’un supplément de crédit en quelque sorte improvisé fut alloué sur l’heure pour établir dans les bureaux du ministère du commerce un service spécial et complet de statistique industrielle et agricole, — fondation aussitôt accomplie et d’où devaient sortir tant d’utiles travaux. Enfin le 10 juillet suivant parut au Moniteur un rapport au roi sur les douanes où le projet d’enquête était officiellement annoncé, rapport empreint d’un tel esprit d’impartialité que tout le monde s’en loua, et que les partisans du statu quo ne purent eux-mêmes s’empêcher de l’approuver. Il exposait le but de la mesure, l’urgence et la nécessité pour l’administration non moins que pour le public d’avoir enfin le cœur net de tant de récits contradictoires, de tant d’assertions inconciliables dont l’industrie française était l’objet, et notamment de savoir à quelles conditions la lutte lui était possible avec les industries des nations étrangères.

Quant à l’organisation et à la mise en œuvre de l’enquête, elles ne devaient souffrir aucune difficulté. Le conseil supérieur du commerce et des manufactures était l’intermédiaire naturel et tout trouvé entre les délégués des industries, les témoins, les acteurs de l’enquête, et d’une part l’administration, de l’autre le juge en dernier ressort du débat, le public, à qui par la voie de la presse toutes les dépositions devaient aboutir. Telle était en effet l’originalité de ce projet soumis à l’approbation royale que la publicité n’était pas réservée, comme il arrive dans les enquêtes ordinaires dirigées par l’administration, seulement à l’esprit, à la substance des dépositions résumées ou analysées par les commissaires enquêteurs, mais que tous les dires, toutes les assertions, toutes les paroles prononcées devant la commission d’enquête, c’est-à-dire devant le conseil supérieur du commerce, devaient être imprimés in extenso dans le Moniteur.

Ce programme une fois connu, les villes manufacturières, les places de commerce, les centres de production et d’échange, se mirent en devoir de répondre à l’appel qui leur était fait de se choisir d’intelligens organes, de bons et habiles représentans. Le rapport leur donnait trois mois pour se préparer; puis une circulaire du ministre adressée aux chambres de commerce vint compléter les instructions, fixer l’époque exacte de l’ouverture de l’enquête, et annoncer que la question des tissus serait la première à l’ordre du jour.

Nous ne dirons pas que ce fut là un de ces événemens qui passionnent les esprits comme certaines discussions politiques, ou même seulement comme certains grands drames judiciaires; mais dans tous les rangs du public où ces questions industrielles avaient quelques racines l’attente était excitée. Le 8 octobre 1834, la première séance fut tenue, et aux questions concertées entre le ministre