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tracés de son appareil, M. Marey appliquait le petit tambour explorateur sur son biceps à l’aide d’une bande roulée, puis exécutait des mouvemens variés; il soulevait des poids, étirait un ruban de caoutchouc, ou frappait contre le dessous d’une lourde table qui arrêtait brusquement la main. La comparaison des tracés rend manifeste l’existence d’un obstacle élastique pendant la descente de l’aile, tandis que la courbe de l’élévateur est celle d’un muscle qui soulève un poids : l’obstacle élastique est l’air comprimé; le poids, c’est la masse inerte de l’aile. On peut voir là une preuve nouvelle de la fidélité avec laquelle les appareils myographiques reproduisent toutes les phases des mouvemens volontaires.

Nous avons déjà vu que le va-et-vient de l’aile est accompagné d’un pivotement de l’humérus autour de son articulation. Pour constater cette rotation de l’aile, M. Marey a imaginé d’attacher sur le dos de l’oiseau un petit appareil fort ingénieux, composé de plusieurs leviers et de deux ampoules rectangulaires qui communiquaient par deux tubes flexibles avec l’appareil récepteur. La discussion des tracés ainsi obtenus a montré que la pointe de l’aile d’une buse décrit pendant chaque battement une espèce d’ellipse avec une petite inflexion au début qui rappelle le coup de fouet du bras d’un nageur.

Il restait à enregistrer les soubresauts que la réaction des coups d’aile fait décrire au corps de l’oiseau. À cette fin, M. Marey fixait sur le dos du volatile un petit tambour à peau très lâche, lestée d’une masse de plomb. L’inertie du plomb l’empêchait de suivre les mouvemens brusques imprimés au tambour; il déprimait la membrane quand le tambour était soulevé, il restait en arrière quand le tambour descendait, et il en résultait tour à tour une compression et une dilatation de l’air intérieur qui se transmettaient à l’appareil récepteur par un tube de communication. Appliqué à plat sur le dos de l’oiseau, le tambour accusait donc les oscillations verticales du corps de l’animal; appliqué de champ, il trahissait les alternatives de la vitesse horizontale. Les curieux tracés de ce télégraphe aérostatique permettent de reconnaître l’existence de deux ondulations ascendantes du corps pour chaque révolution de l’aile chez un canard sauvage; chez la buse, le busard, la chouette, la seconde oscillation se trouve à peine indiquée. D’après M. Marey, cette seconde montée plus faible se produit au moment où l’aile revient, et s’explique par l’impulsion ascensionnelle que l’aile emprunte à la résistance de l’air aux dépens de la vitesse horizontale. Cette hypothèse serait confirmée par les tracés, car on y voit la progression horizontale se ralentir au moment où l’aile remonte, et ces alternatives, assez faibles au départ, s’accusent plus nettement quand l’oiseau est lancé, et que sa vitesse de progression de-