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lequel il doit coucher. Il place sous lui la couverture de caoutchouc et se couvre ensuite d’une couverture de laine. « Cette précaution, dit M. Roussillon, a dû, autant que l’usage de la chemise et du caleçon de laine, qu’on ne saurait trop recommander[1], contribuer au remarquable état sanitaire des armées du nord. La cause principale des maladies de nos soldats est la nécessité fréquente, quand on marche, de camper le soir sur des terres détrempées ; la couverture de caoutchouc a parfaitement réussi à prévenir ce danger. Pour subvenir à l’inexpérience de leurs officiers et de leurs soldats, les Américains avaient fait imprimer et distribuer à un nombre immense d’exemplaires : 1° une instruction adoptée dans l’armée anglaise sur la manière de camper, 2° les règles relatives à la santé du soldat, 3° les règlemens d’hygiène militaire. » Bientôt on se conforma partout à ces principes, et c’est ainsi qu’à peu de frais en somme on a épargné tant d’existences, et qu’on a eu une armée robuste, compacte, sur laquelle les intempéries n’avaient pas prise, et qui défiait les épidémies. Je passe sur le chapitre de l’alimentation, pour laquelle les Américains n’ont rien épargné, toujours sur la bonne raison que le grand objet de l’administration de la guerre est de maintenir le soldat en bon état et en pleine force. Un détail intéressant, c’est que les armées étaient suivies, autant que possible, d’immenses troupeaux de bœufs. Les confédérés qui occupaient Pétersburg ont pris en une seule fois quatre mille têtes de bétail à l’armée du nord. On avait perfectionné aussi les moyens de transport. Le chariot du modèle américain, employé avec quelques améliorations par notre armée expéditionnaire du Mexique, lui a rendu de grands services. Je coupe court, pressé que je suis par le temps, pour arriver au service hospitalier. Dès le commencement de la guerre de sécession, le nord n’eut pas seulement à organiser un nombreux personnel médical ; il lui fallut construire des hôpitaux militaires capables de recevoir au-delà de 100,000 blessés ou malades, préparer des dépôts de convalescens, des dépôts d’invalides, ériger des magasins pour les médicamens, les objets de pansement et le matériel d’ambulance. Le 30 juin 1862, quatorze mois après le commencement des hostilités, on avait 150 hôpitaux sédentaires ; quand la guerre se termina, il y en avait 233, présentant ensemble 137,000 lits, dont rarement plus de 100,000 ont été occupés.

Tous ces édifices étaient en bois, conformément à cette opinion très répandue, à tort ou à raison, chez les hygiénistes américains, que, quelques soins minutieux que l’on prenne, l’hôpital le mieux

  1. J’espère que notre administration de la guerre aura remarqué cette recommandation.