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mode de respiration diurne. La force vive de la lumière solaire peut donc, comme le dit très bien M. Van Tieghem, qui a découvert cette propriété curieuse, se fixer, s’emmagasiner dans les plantes vivantes, pour agir après coup dans l’obscurité complète, et s’épuiser peu à peu en sa transformant en un travail chimique équivalent. Elle se fixe semblablement dans les sulfures phosphorescens pour apparaître ensuite sous forme de radiations moins intenses ; elle s’accumule dans le papier, l’amidon et la porcelaine, pour se manifester, après un temps plus ou moins long, par son action sur les sels d’argent. La propriété que possèdent les cellules vertes des végétaux n’est donc pas isolée ; c’est un cas particulier de cette propriété générale, inhérente à beaucoup de corps, de retenir dans leur masse, sous une forme inconnue, une partie des vibrations incidentes, et de les conserver en les transformant, pour les émettre plus tard, soit à l’état de radiations lumineuses, soit à l’état de travail chimique ou mécanique. Le grand principe de la transformation des forces se vérifie ainsi dans le règne végétal. On pourrait enfin remarquer que ces faits d’activité persistante, provoqués par une excitation initiale, viennent à l’appui de cette idée, que les forces vives sont dans un lien étroit avec la structure des molécules des corps, et peut-être même sont l’expression déterminée de cette structure. On ne conçoit pas d’énergie variée dans un atome mathématique et irréductible ; mais dans une molécule formée d’un certain nombre d’atomes on se représente des figures dynamiques d’un ordre très composé.

Nous n’avons jusqu’ici envisagé que l’action de la lumière blanche, l’effet d’ensemble des rayons que nous envoie le soleil, mais cette lumière n’est pas simple. Elle se compose d’un grand nombre de radiations dont la couleur et les propriétés sont distinctes. Lorsqu’on décompose la lumière blanche par le prisme, on obtient sept groupes de rayons visibles et inégalement réfrangibles, violet, indigo, bleu, vert, jaune, orangé, rouge. Le spectre ou ruban coloré ainsi obtenu se prolonge et s’étend par des radiations invisibles. Au-delà du rouge existent des radiations de chaleur obscure ou rayons calorifiques, au-delà du violet des radiations dites chimiques ou rayons ultra-violets. Les premières agissent sur le thermomètre, les secondes déterminent des réactions énergiques dans les composés chimiques. Quelle est leur influence sur la végétation ? La lumière solaire agit-elle par ses rayons colorés, par ses rayons de chaleur ou par ses rayons chimiques ?

Cette question a fait l’objet d’un grand nombre de travaux importans, et n’est peut-être pas encore résolue, Daubeny le premier, en 1836, fit respirer des plantes dans des verres colorés, et vit que le