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des teintes brunes croissantes des ardeurs graduelles des climats. Les Hindous de l’Himalaya sont presque blonds ; ceux du Décan, du Coromandel, du Malabar, de Ceylan, sont plus foncés que certaines tribus nègres. Les Arabes, olives et presque blonds en Arménie et en Syrie, sont basanés dans l’Yémen et le pays de Mascate. Les Égyptiens offrent une gamme chromatique ascendante du blanc au noir, en partant des bouches du Nil et en rebroussant vers ses sources. même remarque pour les Twariks du versant méridional de l’Atlas, qui sont simplement olivâtres, tandis que leurs frères de l’intérieur de l’Afrique sont noirs. Les monumens antiques de l’Égypte nous montrent un fait non moins significatif. Les hommes y sont toujours représentés en rouge-brun ; ils vivaient en plein air ; les femmes, toujours renfermées, ont une teinte jaune pâle. Barrow assure que les Tartares mandchoux ont blanchi pendant leur séjour en Chine. Rémusat, Pallas, Gutzlaff décrivent des femmes chinoises remarquables par un teint blanc européen. Les juives du Caire ou de Syrie, toujours cachées sous des voiles ou dans des maisons, ont le teint blafard et mat. Dans les races jaunes de la Sonde et des Maldives, les femmes, toujours couvertes, sont pâles comme la cire. On sait d’ailleurs que les Esquimaux blanchissent pendant leur long hiver. Sans doute ces phénomènes sont des résultats de plusieurs influences simultanées, et la lumière n’y joue pas seule un rôle. La chaleur et d’autres conditions de milieu interviennent probablement dans ces actes chromatiques. L’action particulière et effective de la radiation lumineuse y est pourtant incontestable[1].

Tout le système des fonctions organiques participe aux bienfaits de la lumière. L’obscurité semble favoriser la prépondérance du système lymphatique, la susceptibilité des membranes muqueuses aux affections catarrhales, la flaccidité des parties molles, les gonflemens, les déviations du système osseux, etc. Les mineurs, les ouvriers qui travaillent dans des ateliers mal éclairés, sont exposés à toutes ces causes de misère physiologique. Remarquons à ce propos que certaines radiations du spectre se comportent envers l’animal comme l’obscurité, la lumière orangée entre autres, qui, d’après M. Bert, entrave le développement des batraciens. Or, si cette lumière est funeste aux animaux, elle ne l’est pas aux plantes, ainsi que nous l’avons vu. Réciproquement la lumière verte, qui est nuisible aux végétaux, est extrêmement favorable aux animaux. Il y a donc une sorte d’opposition et d’équilibre sous le rapport des affinités lumineuses dans les deux grands règnes vivans. La lumière

  1. Voyez, pour l’étude de ces changemens de couleur en connexité avec l’intensité lumineuse, le Soudan, par M, Trémaux, et l’Histoire des races humaines, par M. de Salles.