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Galilée fût le théâtre, et qui jeta un certain éclat vers le ive siècle après Jésus-Christ. L’un de ces deux édifices n’est plus représenté que par une porte isolée dans la campagne, et qui a la forme de la lettre grecque π ; le linteau dépasse les deux jambages à droite et à gauche ; ils sont décorés d’ornemens sculptés d’un goût exquis, lesquels montent et descendent en suivant les contours de la porte, accompagnés d’une longue inscription hébraïque. Nous n’avons pas pu la déchiffrer ; mais il n’est pas exact, comme on l’a dit, qu’elle commence par le mot Chalom, salut ou paix ; ce mot y est, mais dans le cours de l’inscription. Les arabesques en guirlande qui, sur plusieurs rangs, suivent les contours de la porte fourniraient à nos ornementistes des motifs d’une grande élégance. L’art judaïque, étroitement limité par l’interdiction absolue des formes humaines ou animales, se montre ici ingénieux et plein de grâce ; il a su inventer des dessins charmans, variés tantôt par des entre-croisemens de lignes purement géométriques, tantôt par des formes empruntées avec goût à la nature végétale. Ce n’est pas toujours, il faut le reconnaître, anéantir l’art que de l’enfermer dans des limites restreintes ; l’ornementation juive, dont nous avons ici un exemple, est vraiment de l’art.

Une autre synagogue beaucoup mieux conservée sert de maison d’habitation. Un vestibule à colonnes précédait la façade, il est représenté par une seule colonne entière et de nombreux fragmens. La façade subsiste, percée d’une porte médiane en plein cintre, de deux portes en π décorées différemment, et de deux niches à frontons triangulaires ; mais ce qui reste de sculptures est très loin de l’élégance correcte et de la délicatesse que nous admirions dans les débris de la première synagogue. Non loin de cette porte se trouvent des chapiteaux singuliers et de mauvais goût ; ils ont appartenu à des colonnes engagées l’une dans l’autre, deux à deux, et qui occupaient probablement une encoignure ; le plan du double fût a la forme bizarre d’un cœur.

Le culte israélite possède encore dans la contrée des sanctuaires dignes d’intérêt. En deux heures, nous arrivâmes de Kefr-Birein à Meiroun, où nous vîmes non-seulement une porte de synagogue antique analogue aux précédentes, mais un édifice moderne érigé sur la sépulture d’un rabbin fameux, Chomrôn, et de son fils. On prétend à tort que les tombes des deux plus grands rivaux parmi les docteurs de la loi peu avant notre ère, Hillel et Chammaï, sont à Meiroun. Il est possible cependant qu’elles existent encore, et qu’elles ne soient pas fort éloignées. Le monument de Chomrôn est un lieu de pèlerinage très fréquenté par les Israélites. On ne visite pas les deux tombeaux ; on entre seulement dans une sorte de chapelle qui