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superbe oiseau, qui habite non-seulement les Alpes, mais encore toutes les hautes montagnes de l’Europe, du nord de l’Afrique et de l’Asie, fort répandu en Suisse jusqu’au commencement de notre siècle, est devenu rare, tant il a été poursuivi par les chasseurs, et c’est dans la Haute-Engadine qu’il a été le plus épargné.

L’aigle fauve, dont on nous a montré des repaires, n’est pas très rare sur les Alpes rhétiques ; des rapaces nocturnes viennent dans les forêts de mélèzes et d’arolles ; le grand-duc (Bubo maximus) a été pris aux environs de Saint-Moriz, la chouette dans plusieurs bois, l’effraie à Silvaplana. L’engoulevent et les hirondelles paraissent dans la haute vallée, où la belle saison est si courte ; on y voit le rossignol, quelques fauvettes, des merles ; la grive commune, dans ses migrations, passe sur les montagnes ; le mauvis et la litorne (Turdus pilaris) nichent par hasard dans les bois. Le merle d’eau (Cinclus aquaticus), doué de l’étrange faculté de courir sur les pierres dans le lit des ruisseaux, installe souvent son nid dans la mousse humide, au-dessous des cascades. Le roitelet s’établit dans les forêts d’arbres verts ; l’accenteur (Accentor modularis), qui ne craint pas le froid, fréquente les montagnes de la Haute-Engadine depuis le mois de mars jusqu’au mois d’octobre. Les becs-croisés (Loxia curvirostra et Pytiopsittacus), si habiles à extraire les graines des cônes des arbres résineux, trouvent aisément la pâture dans les forêts d’arolles. Notre moineau ordinaire, peu difficile dans son choix, sautille par les rues de Samaden et de Pontresina, et le pinson parfois chante dans les environs. Un bel oÎ3eau brun, tout tacheté de blanc, le casse-noix, a été observé sur les montagnes jusqu’à la hauteur de 3,000 mètres au-dessus du niveau de la mer en des endroits où il existait à peine quelques broussailles. Une sorte de corbeau d’un noir intense avec le bec jaune comme le citron et les pieds rouges comme le carmin, le choquart des Alpes (Pyrrhocorax alpinus), trouve ici les conditions d’existence les plus heureuses ; il n’aime que les régions voisines dès neiges éternelles, et c’est dans les crevasses des rochers inaccessibles qu’il édifie son nid.

Des oiseaux magnifiques qui chaque année sont un peu plus rares que les années précédentes, les coqs de bruyère, que les naturalistes appellent des tétras, existent encore dans les forêts et les broussailles de la Haute-Engadine. La grande espèce (Tétras urogallus) est à la vérité à peu près détruite, mais on voit assez souvent le tétras à queue fourchue ; celui-ci se tient habituellement à la limite supérieure de la région boisée ; pendant l’été, il se cache dans les massifs de rhododendrons ; il construit un nid et fait sa couvée au milieu de ces délicieux buissons de roses des Alpes ; pour nourriture, il a les cônes et le feuillage des arolles, les baies de