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La
politique d’envahissement

LOUVOIS ET M. DE BISMARCK.



La lutte de l’esprit de conquête contre l’esprit de travail est sans doute aussi vieille que l’humanité. Ce n’est pas d’aujourd’hui seulement que l’on voit des nations aspirer à la paix et des souverains ou des ministres les plonger dans tous les maux et dans toutes les fureurs de la guerre. Presque de tout temps, il s’est trouvé dans le cœur des peuples une ambition, celle de grandir par la paix, par l’activité, par l’intelligence, et il s’est trouvé dans le cœur de quelques hommes une autre ambition, celle de grandir par la conquête. Des rois et des ministres qui se disaient chargés par Dieu de la conduite des nations les ont entraînées hors de leur voie, loin de leur intérêt, et pour acquérir eux-mêmes quelques titres pompeux et ce que le langage humain appelle la gloire, pour être proclamés grands rois ou grands ministres, ils ont déchaîné la guerre ; ils ont couvert le sol de ruines, rempli les cœurs de haine, arrêté le travail, abaissé l’intelligence. Ils se sont fait un nom retentissant dans l’histoire ; mais ils ont mis le trouble dans l’existence et dans la conscience même des hommes.

Nous voudrions montrer ce que c’est que l’esprit de conquête et d’envahissement, quels en sont les caractères essentiels, les procédés ordinaires, les allures, le langage, si cet esprit a changé avec le temps, ou s’il est encore ce qu’il était autrefois ; nous voudrions dire surtout quels fruits il produit et ce qu’il coûte aux nations. Deux exemples frappans nous serviront à le faire con-