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la caisse d’amortissement ; on avait reconnu qu’elle ne fonctionnait plus d’une façon utile, que les revenus, détournés sans cesse de l’objet auquel ils étaient affectés, allaient se perdre dans la masse des dépenses publiques, et qu’il était essentiel, pour réduire effectivement la dette, d’établir un système plus sévère. On crut y parvenir en instituant le budget spécial dont on vient de parler. On le composa avec un certain nombre de recettes et de dépenses prises à la fois dans les services de l’état et dans l’ancien service de l’amortissement. Comme ressources, on y appliqua le revenu des forêts, l’impôt du dixième sur le prix des places et sur le transport des marchandises dans les chemins de fer, les bénéfices à partager entre l’état et les compagnies de chemins de fer, les bénéfices réalisés chaque année par la caisse des dépôts et consignations, les arrérages des rentes rachetées par la caisse d’amortissement, enfin les excédans de recette du budget de l’état affectés à cette destination. Les dépenses consistèrent dans le service et le rachat de la dette spéciale des canaux et ponts et des obligations trentenaires. La caisse dut aussi fournir les avances acquises aux compagnies de chemins de fer à titre de garanties d’intérêt. Tout ce qui n’était pas consommé par ces dépenses fut consacré à l’amortissement de la rente 3 pour 100 ; on fut tenu d’employer chaque année en achats une somme d’au moins 20 millions, qui devait être complétée par le trésor en cas d’insuffisance des excédans de recette de la caisse.

Aux quatre budgets déjà existans, on en joignit un cinquième en 1868, celui de l’emprunt de 429 millions. La loi du 1er août 1868, en autorisant cet emprunt, avait défini et limité avec le plus grand soin l’emploi que le produit devait recevoir. Pour assurer le respect de ses prescriptions, elle pensa qu’il ne fallait pas moins qu’un budget spécial. Elle ordonna donc qu’à la fin de chaque exercice il serait dressé un compte distinct des dépenses effectuées avec ces ressources.

Tout en rendant justice aux idées qui ont inspiré ces distinctions, on peut leur reprocher d’avoir causé, par la multiplicité des divisions, une certaine gêne à l’administration, et d’avoir entravé le coup d’œil d’ensemble sur la situation des finances. Ce n’est qu’en réunissant et additionnant les chiffres des cinq budgets qu’il a été possible pendant ces dernières années d’obtenir le tableau complet des ressources et des charges de l’état.

Les révolutions opérées sous l’empire dans la forme du budget général se sont reproduites dans la manière dont il a été voté. Il a été successivement voté par ministères, ensuite par sections de dépenses d’un même ministère, enfin par chapitres. On sait toute l’importance attachée aux divisions du vote : ce sont elles en effet qui déterminent les limites dans lesquelles est maintenue la liberté