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chitecture et de beaux-arts, M. Baltard, rien ne fut négligé de ce qui pouvait amener un commencement de régénération et offrir des garanties plus sérieuses que par le passé dans l’éducation donnée aux élèves des écoles primaires de la ville[1] ; mais, à côté de cette louable sollicitude de l’administration municipale, quelle étrange inertie à Paris même dans tout ce qui tient à l’organisation ou à la direction par l’état de l’enseignement élémentaire du dessin ! Qu’est devenu le projet, annoncé il y a déjà quelque temps, de remettre sur un nouveau pied ou plutôt de rendre sagement à sa destination primitive cette école de dessin et de mathématiques établie rue de l’École-de-Médecine, et fondée au xviiie siècle avec une intelligence si nette des besoins auxquels elle devait répondre, des progrès qu’il lui appartenait de déterminer ou de préparer ? Et si nos regards se portent sur les écoles de dessin ouvertes dans les villes des départemens, qu’y voyons-nous, à de bien rares exceptions près ? La routine installée à la place des règles et de la doctrine, l’enseignement officiel réduit à n’être plus, pour ceux qui le reçoivent, qu’un exercice mécanique, pour ceux qui le donnent, qu’un moyen de s’assurer quelques chétives ressources personnelles. Nulle initiative d’ailleurs, nul essai de réforme pareil aux tentatives que poursuit à Paris l’Union centrale des beaux-arts appliqués à l’industrie. Partout l’indifférence ou le sommeil, dans les conseils-généraux aussi bien que dans les chambres de commerce, dans les académies locales comme dans les sociétés des amis des arts, si nombreuses pourtant sur le sol de la France. Il semble que tout doive se borner à continuer aujourd’hui ce qui se pratiquait hier, et que l’on ait assez fait pour le salut de l’art national quand on a, bon an mal an, ouvert trois ou quatre expositions départementales de tableaux et placé en quantité raisonnable des billets de loterie. Au-delà des frontières, il faut le redire, ce n’est pas ainsi qu’on entend le progrès, c’est par des procédés plus radicaux qu’on travaille à le susciter, et malheureusement les résultats obtenus prouvent assez que les calculs les plus justes et la meilleure méthode ne sont pas de notre côté. Il n’y a donc pas de temps à perdre pour arrêter les menaces du dehors et pour empêcher à l’intérieur le mal de s’aggraver. Une ré-

  1. Quelques chiffres suffiront pour résumer les faits. De 1865 à 1867 inclusivement, 353 candidats se présentèrent aux examens pour l’obtention du certificat d’aptitude aux fonctions de professeur ; 70 reçurent ce diplôme, dont 51 pour le dessin d’art et 19 pour le dessin géométrique. En 1863, une maigre somme de 30,000 francs était inscrite au budget de la ville pour subventions à quelques classes de dessin qui ne comptait que 2,888 élèves ; en 1867, la ville ne consacrait pas moins de 312,000 fr, à cet enseignement, donné alors à 12,000 élèves, tant des classes du jour que des classes du soir.