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mens pouvant se transformer les uns dans les autres suivant une loi mathématique, il en résulte qu’il y a des rapports d’équivalence entre les diverses manifestations de l’activité physique, par exemple qu’il existe un équivalent mécanique de la chaleur, un équivalent calorifique de l’électricité, etc. Or ce mouvement intestin que l’analyse et l’induction révèlent, ce frémissement corpusculaire qui donne aux corps les qualités sans lesquelles ils ne seraient point perçus, à savoir le poids, la couleur, la chaleur, etc., — ce mouvement, sous toute forme, implique un principe moteur, quelque chose d’irréductible et de simple, une spontanéité analogue à celle que Leibniz conçoit dans les monades. Qu’est-ce que la force vive, l’énergie potentielle, l’énergie virtelle dont les physiciens font un si fréquent usage dans leurs spéculations, sinon des entéléchies métaphysiques, raison intelligible des actes dynamiques, des tendances semblables à celles que l’âme sent au dedans d’elle-même ? Dira-t-on que tous ces aspects multiples et variés de la force physique sont une dérivation de la force mécanique simple dont la somme ne change pas dans l’univers ? Mais alors pourquoi le mouvement est-il devenu ici chaleur, là électricité, et lumière d’un autre côté ? Ne serait-ce pas qu’outre les monades qui sont le ressort moteur, il en existe dont le rôle spécial, au point de vue de notre sensibilité, est d’agir sur d’autres capacités perceptives que celles par où nous connaissons le mouvement ?

Sous un autre aspect, on retrouve encore dans les sciences contemporaines quelques-unes des grandes pensées de Leibniz, grâce auxquelles ces sciences ont pris un caractère tout nouveau ; nous voulons parler des formules logiques où l’esprit concentre les matériaux de la connaissance des idées synthétiques qui sont le terme des hautes inductions. Après avoir montré comment il faut concevoir l’esprit dans la nature, nous devons indiquer comment il importe de concevoir la nature dans l’esprit, car les sensations, en subissant l’élaboration de l’esprit pour devenir connaissances, empruntent et empruntent beaucoup de ce qui est propre à l’essence spirituelle. Les procédés intellectuels, dit M. Charles Robin, font corps avec le reste de la science, tellement que l’histoire montre l’exposition d’une idée générale juste, reconnue comme équivalente ou supérieure à celle des faits.

Quels sont donc ces procédés intellectuels, ces idées générales ? Ces procédés se résument dans la dialectique synthétique et intuitive, et ces idées dans des concepts morphodynamiques dont nous allons caractériser les principaux. L’idée de série est peut-être le plus important. Soit qu’il considère les espèces minérales ou chimiques, soit qu’il considère les espèces animales ou végétales, l’esprit les range en série. C’est la forme sous laquelle il conçoit l’en-